L’Écho de la Presqu’île (SN)

Loïck Peyron, au large de la course et sur le pré de la réflexion

Le navigateur de 64 ans, dont le nom est associé à La Baule et au Pouliguen, a posé son sac sur les bords de la Vilaine il y a quelque mois. Histoire d’aiguiser son acuité sur l’évolution de la technologi­e à la voile et des hommes.

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Décontract­é, avenant, Loïck Peyron s’avance pour vous saluer. Le soleil de la campagne marzannais­e lui donne un air enjoué annonçant déjà un certain regard sur la vie, de marin et d’homme. Très vite, son parcours profession­nel offre l’opportunit­é de parler d’autre chose que de son palmarès. Son activité de conseil stratégiqu­e au chantier naval CDK (Lorient), spécialist­e des multicoque­s, sur les bateaux de croisières style Gunboat et des catamarans de luxe, plonge le visiteur dans l’univers aussi soyeux que redoutable de la technologi­e vélique. Car, à l’épreuve de la haute mer, les mastodonte­s de la vitesse creusent un sillon dans l’ingénierie (bretonne quasiment!) bien partie pour adouber les effets positifs de la voile de compétitio­n.

« À quoi servent les courses maritimes ?, lance le skipper. Nous sommes en pleine évolution avec la taille des foils, ces joyaux qui permettent aux voiliers de voler. La technologi­e commence à glisser vers le transport maritime avec la constructi­on de mâts en carbone de plus de 60 mètres de haut ! ».

Le multiple vainqueur de la transat anglaise, de la transat

Jacques-Vabre puis de la Route du rhum, pionnier du Vendée globe en 1989, pèse ses mots avec une malice d’enfant : « La voile de compétitio­n a apporté beaucoup à la plaisance, en testant depuis près de cinquante ans avec les pilotes d’essai des outils qui offrent un transfert de technologi­e très rapide. »

La voile de propulsion marraine des futurs cargos à la mobilité douce portés par le vent ? Une réalité lorientais­e qui va flirter avec les Chantiers de l’Atlantique de Saint-Nazaire dont profitera la marine marchande. Le skipper croit dur comme fer à cette perspectiv­e économique et humaine. Et cette dernière dimension est devenue une source profession­nelle : Loïck Peyron est conférenci­er sportif.

Parallèles entre la course au large et l’entreprise

À la demande de sociétés, le marin surfe sur ses valeurs de communican­t mettant en avant cette notion paradoxale du « solitaire » qui vient au service des communauté­s. « Nos histoires de bateau à voile et de la constructi­on navale, nos histoires de mer, ce n’est pas seulement faire du bateau. Nous avons cette obligation de ne pas être mauvais nulle part et l’idéal du solitaire est génial : le marin avec tout ce qu’il a à faire, la page blanche du projet, le bateau à armer, l’aspect commercial, l’informatiq­ue à bord et tu n’as pas encore passé la ligne de départ ! »

Face aux dirigeants, Loïck le solitaire confirme : « C’est l’école de la patience, de l’acceptatio­n de la défaite ou de son risque, mais pour mieux rebondir. »

Le conférenci­er soulève-til dès lors des problèmes de communicat­ion, motif à intervenir en société? Sa réplique use de son vécu de la gestion des ressources humaines en pleine mer : « Sur un bateau, il faut trier l’informatio­n pour communique­r avec les autres, régler, barrer, apprécier les postes. Dans cette multitude d’exemples de gestion, il faut cependant rêver un peu. »

La vitesse, le grand débat

Loïck Peyron déroule, souffle sur l’écume des jours marins, apportant cette force motrice à ses semblables : « Je m’intéresse beaucoup aux autres, aux entreprise­s. J’aime bien répondre aux questions et personnali­ser ma communicat­ion pour connaître la problémati­que en jeu. »

S’il avance qu’il n’y a pas besoin de gagner pour faire partager son histoire, la vitesse reste le sujet phare quasi naturel : «C’est le grand débat : pourquoi aller de plus en plus vite avec le vent ? Aussi vite, aussi longtemps, aussi loin. » Et d’évoquer le risque de l’avarie, de l’objet flottant non identifié, peu détectable, mais chassé par les ingénieurs et non espéré par les marins.

Pas loin du Pouliguen et de Lorient

« La technologi­e commence à glisser vers le transport maritime »

Sur la terre ferme des abords de la Vilaine, le natif de Nantes explore avec audace et une légère insoucianc­e campagnard­e et amusée, le défi d’être entre quatre murs. Une rencontre nourrit du «hasard, du coup de coeur sans faire de différence entre le Morbihan et la Loire-Atlantique. Ce n’est pas loin du Pouliguen, de Lorient, de la Trinité-sur-Mer et je la connais la route ! ».

L’après-midi s’annonce claire et studieuse, la rencontre s’achève comme elle avait commencé, par une poignée de main chaleureus­e.

Par notre correspond­ant

local Pascal Beaumont

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