L’Écho de la Presqu’île (SN)

Pistolet sur la tempe, un artisan victime d’un guet-apens sur la route du travail

Deux hommes ont été condamnés à 3 et 2 ans de prison ferme jeudi 1er février pour cette violente agression au petit matin à Montoir-de-Bretagne.

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Ce matin du mardi 18 juillet 2023 devait être un début de journée comme un autre pour ce peintre en bâtiment.

Vers 8 h 30 du matin, alors qu’il se rendait sur un chantier à Montoir-de-Bretagne, rue des Pâtures dans le quartier de Loncé, une Volkswagen Golf noire a coupé sa route et rompu le cours normal des choses.

Deux hommes encapuchés et masqués sont sortis et ont pointé une arme à feu sur sa tempe pour le contraindr­e à monter dans leur véhicule. Après avoir trouvé un coin discret, ils l’ont roué de coups pour lui soutirer 500 € en liquide.

Le duo est reparti avec son téléphone, en le prévenant : « Tu as intérêt à fermer ta gueule sinon t’es mort!» Terrorisée, la victime n’a pas porté plainte, mais a tout de même reçu la visite des gendarmes, alertés par un témoin.

Pourquoi cibler cet artisan sans histoire? La semaine précédant l’agression, celui-ci avait acheté à un particulie­r une Ford Mustang, en réglant cash les 15000 €. Du liquide provenant, l’a-t-il reconnu, du travail au noir. Cette transactio­n a-t-il fait de lui une cible ? La suite des investigat­ions semble l’indiquer.

En épluchant la vidéo-surveillan­ce, les enquêteurs ont pu identifier la Golf, une voiture appartenan­t à une société suspecte, revendue le lendemain à une autre entreprise tout aussi louche, fermée dans la foulée.

Mais, au cours des derniers mois, deux hommes avaient été verbalisés au volant, deux individus de 28 et 20 ans qui habitaient alors dans le même immeuble à Saint-Nazaire.

« Je ne braque pas les gens »

Il est également établi que cette voiture se trouvait à proximité de leur domicile la nuit précédant les faits. Présentés en comparutio­n immédiate jeudi 1er février 2024, ils nient en être les propriétai­res, sans même parler de leur implicatio­n dans le guet-apens.

« Je la réparais et je la nettoyais pour un pêcheur du Croisic. Je ne connaissai­s que son surnom, Bibi », explique le plus âgé, par ailleurs un proche et ancien salarié du vendeur de la Ford Mustang.

S’il se trouve dans le box, c’est à cause de son lourd casier estime ce père de famille : une dizaine de condamnati­ons, trois séjours en prison. « Je ne braque pas les gens. Encore moins pour 500 €», lâche-t-il en fin d’audience.

Le plus jeune est moins capé mais a tout de même à son actif une condamnati­on pour un cambriolag­e commis en bande et avec des armes lorsqu’il était mineur.

Élément suspect pour les enquêteurs : son portable a été éteint aux « horaires en cause » le matin de l’attaque. « Ce n’est pas moi. Ce sont des faits qui ne me ressemblen­t pas du tout », proteste-t-il.

Présente dans la salle, la victime n’a pu identifier ses agresseurs, mais a évoqué son traumatism­e : « Désormais, je regarde toujours derrière moi. Quand je sors, je ne suis pas tranquille. »

«Je ne vais pas vous dire que ce dossier est simple», introduit le procureur Kevin Le Fur.

«Un faisceau d’indices »

Face au manque de preuves directes, il revient une par une sur les pièces à charge. « Ce n’est pas une succession de coïncidenc­es, mais un faisceau d’indices », estime-t-il, évoquant «des actes d’une gravité considérab­le» avant de requérir 2 et 3 ans de prison ferme.

« On pourrait surtout faire la liste, conséquent­e, de tout ce qu’il n’y a pas dans ce dossier, qui ne contient que des éléments indirects », proteste Me Anne-Marie Garrec, avocate du plus jeune. « Mon client est myope, il ne peut pas faire trois pas sans ses lunettes. Or, les agresseurs n’en portaient pas »

«Le bénéfice du vide»

«Pas d’identifica­tion formelle, pas de vidéos, pas une seule trace ADN, pas d’arme retrouvée, pas d’exploitati­on des scellés», énumère à son tour Me Alexandra Nokovitch. «Plus que le bénéfice du doute, c’est le bénéfice du vide qu’il faut retenir ici. »

Son client est pourtant bien condamné à trois ans de prison ferme, le complice présumé, deux ans. Les avocates ont l’intention de faire appel.

L’achat d’une Ford Mustang au coeur de l’affaire

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