Vers un quasidoublement du parc éolien en mer?
Mercredi 6 mars, une carte, révélant des zones pour de probables futurs parcs éoliens offshore, a été dévoilée, suscitant surprise et colère chez les élus et opposants.
C’était un document de travail attendu et réclamé depuis longtemps dans le cadre du débat public sur la mer et le littoral.
Les élus du littoral, réunis mercredi 6 mars 2024 par la préfecture maritime de l’Atlantique, ont découvert la quatrième et dernière carte des nouvelles zones propices à l’éolien en mer axée, pour celle-ci, sur le littoral de Bretagne et des Pays de la Loire.
La publication agace
Sur cette carte de la façade atlantique et de la mer du Nord, les élus ont pu observer des zones coloriées pour le développement de l’éolien d’ici 10 ans, et d’autres pour une mise en place à l’horizon 2050.
Surprise : parmi les espaces propices pour un développement d’ici 10 ans se trouve une extension du parc éolien en mer de Saint-Nazaire, inauguré en 2022 et actuellement le seul parc français offshore dont la totalité des éoliennes produit de l’électricité. L’emplacement indiquerait un quasi-doublement de la surface actuelle.
S’il ne s’agit que de « zones préférentiellement identifiées », selon Bercy, la publication agace, tant chez les élus que chez les opposants historiques au parc éolien. « C’est une carte qui a peut-être une valeur scientifique, administrative, mais qui n’a pas été validée politiquement. Je m’étonne donc qu’elle ait été publiée ainsi », s’interroge le maire de La Baule, Franck Louvrier.
Absence de concertation
La préfecture de Loire-Atlantique a beau rassurer : « Cette carte est destinée à alimenter la concertation en cours et ne présume pas des conclusions du débat public », sa valeur et sa portée sont vite vues pour Alain Doré, coordinateur du collectif Défense de la mer, qui s’oppose depuis 15 ans au parc éolien de Saint-Nazaire. «Quand c’est présenté comme un document de travail, on sait ce que ça veut dire derrière », explique l’opposant qui demande « un moratoire sur la production intermittente centralisée. »
À l’instar du maire de La Baule et du collectif Défense de la mer, la mairie de Batz-sur-Mer s’est également indignée face à « une méthode de concertation qui interroge une nouvelle fois! Car la population locale garde un sentiment amer entre la réalité visible au quotidien aujourd’hui et ce qui avait été présenté au débat public en 2013. »
Autre commune du littoral impactée visuellement par le parc actuel, Pornichet. Le maire, Jean-Claude Pelleteur, a fait savoir qu’« il n’était absolument pas concevable ni tolérable que ce dernier s’installe aussi près de nos côtes, en raison de la taille des éoliennes bien plus imposantes», relayant les craintes de voir arriver des pylônes et pales plus grandes que les précédentes, en raison de l’évolution de la conception dans le secteur.
Pour son homologue et voisin baulois Franck Louvrier, il est « hors de question d’évoquer un agrandissement du parc actuel avant d’avoir revu la méthode de calcul de la taxe de compensation financière pour les communes impactées visuellement. Je pense aussi que les professionnels de la pêche vont vouloir revoir ce plan. »
En effet, le Comité régional des Pêches maritimes et des Élevages marins des Pays de la Loire, COREPEM, a vécu cette publication « comme un affront. (…) Malgré leur bonne volonté et leurs efforts, la position centrale des pêcheurs dans le processus de décision a été dénigrée par la publication de cette carte », saluant au passage « la levée de boucliers des élus locaux. »
Tous, élus comme opposants, dénoncent une méthode qui «met la charrue avant les boeufs. »
Quelle suite ?
Le débat public sur la mer et son focus particulier sur les enjeux éoliens prendra fin le 26 avril prochain. Le cabinet du ministre délégué chargé de l’Industrie et de l’énergie, Roland Lescure, a tenu à rassurer, expliquant que «l’objectif est que tout le monde puisse discuter de ces zones (…) ce ne sont pas des choix définitifs. »
La définition de ces zones favorables au développement de l’éolien en mer devrait aboutir « fin septembre » selon la préfecture de Nantes. Pour l’opposition à ces projets, l’objectif d’ici cette date est de « rallier le soutien d’élus. »
Pour rappel, l’objectif français est de produire 45 GW d’électricité à partir de l’éolien en mer à l’horizon 2050, soit 28 réacteurs EPR comme celui de Flamanville. La production actuelle est de 7 GW.