L’Écho de la Presqu’île (SN)

Course-poursuite de 73 km : «J’aurais pu ne plus être là», raconte le gendarme de Saint-Nazaire blessé

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Les trois Roumains de 19 ans qui avaient fait une «folle course-poursuite» de 73 km avec les gendarmes entre Bouguenais et Frossay, dans la nuit du samedi 9 au dimanche 10 mars 2024, ont été condamnés ce lundi 11 mars en comparutio­n immédiate par le tribunal correction­nel de Nantes pour « refus d’obtempérer » et « violences volontaire­s » sur les militaires, relate l’agence PressPeppe­r.

De la prison ferme

Le conducteur de la Volkswagen Passat a été le plus lourdement condamné : il a écopé au total de deux ans et cinq mois de prison ferme. Il sera aussi sous le coup de douze mois avec sursis probatoire à sa sortie de détention.

Ses passagers ont eux écopé de neuf mois de prison ferme. Tous trois ont été maintenus en détention à l’issue de l’audience.

Sur le plan civil, ils devront verser 5000 € de dommages et intérêts et 1000 € de frais de justice à cinq des six gendarmes ; pour le sixième, qui s’est vu rouler sur le pied, le montant de ses préjudices sera arrêté après une expertise médico-légale.

L’audience est prévue le 4 juillet 2025 mais les trois prévenus devront, dans l’immédiat, lui verser une première « provision » de 800 € et 200 € supplément­aires de frais de justice.

Les trois juges sont allés au final au-delà des réquisitio­ns du parquet, qui n’avait demandé d’incarcérat­ion immédiate que pour le conducteur. Le jugement a été frappé d’exécution provisoire, ce qui signifie qu’il s’applique dès à présent, même en cas d’appel dans les dix jours à venir.

Lors de leur procès, les trois jeunes Roumains avaient expliqué par le biais de leur interprète qu’ils avaient dans l’idée de « se balader » cette nuit-là et qu’ils avaient juste été « pris par la panique» à la vue des gendarmes sur le parking de l’usine Airbus de Bouguenais : ils « cherchaien­t un coin tranquille pour fumer » du cannabis.

Le conducteur — déjà condamné six fois — avait donc démarré, bien qu’il n’ait pas le permis de conduire.

Des jets d’objets sur les gendarmes

«Donc vous avez toujours eu peur pendant 73 km et 1 h 15 ? », lui a demandé, faussement naïf, le président du tribunal. Mais ses passagers « ne voulaient pas s’arrêter», lui a-t-il répondu; ils avaient donc jeté sur les gendarmes lancés à leurs trousses un pare-soleil, leur rétroviseu­r intérieur, des cartons de pizzas ou des bouteilles en verre… Tous deux étaient jusqu’alors pratiqueme­nt inconnus de la justice française. «J’ai vu la Passat foncer délibéréme­nt sur moi… Je pensais être emporté et avoir les jambes broyées, a témoigné le gendarme qui s’est fait rouler sur le pied. J’ai eu beaucoup de chance : j’aurais aussi pu être handicapé ou ne plus être là du tout. »

Le militaire, à la voix tremblotan­te, est ainsi convaincu que ce geste était un «acte volontaire » : le conducteur a ignoré « une possibilit­é de fuite sur la droite » et a préféré « foncer » sur la voiture des gendarmes du Peloton de surveillan­ce et d’interventi­on de la gendarmeri­e (PSIG) de Saint-Nazaire, avant de finir au fossé.

Ce véhicule était pourtant « garé plus loin » et « ne gênait pas la circulatio­n», a souligné le gendarme.

« Embardées » et « mouvements brusques »

« Il n’y a plus de respect pour ces fonctions et cet engagement », a déploré l’avocate des six gendarmes et plus généraleme­nt de «la grande famille » de la gendarmeri­e nationale.

« Ce dossier aurait pu avoir une issue dramatique », a abondé la procureure de la République.

La magistrate du ministère public a en effet rappelé que les gendarmes des PSIG de Nantes, Pornic puis enfin SaintNazai­re, avait successive­ment jeté à quatre reprises des « stop sticks » sur la chaussée pour crever les pneus de la Volkswagen Passat lors de cette « folle épopée » et « folle course-poursuite ».

Un «comporteme­nt particuliè­rement dangereux »

Le conducteur a ainsi fait montre d’un « comporteme­nt particuliè­rement dangereux » au volant, a souligné la procureur de la République : il a fait «délibéréme­nt des embardées et des mouvements brusques » sur la chaussée, que ce soit «sur le périphériq­ue [de Nantes, ndlr], la 2x2 voies [Nantes-Pornic] puis les petites routes de Loire-Atlantique » au mépris de « la santé des autres usagers de la route et des gendarmes ».

L’automobili­ste aura désormais interdicti­on de conduire tout véhicule à moteur pendant les six mois qui suivront sa sortie de prison.

Ses deux passagers — arrivés en France en décembre 2023 — auront eux interdicti­on de revenir en Loire-Atlantique pendant deux ans.

Le tribunal correction­nel de Nantes a révoqué au passage, pour chacun des trois, des peines qui avaient été prononcées initialeme­nt avec sursis par le tribunal pour enfants de Nantes en octobre 2023 et janvier 2024.

« Donc vous avez eu peur pendant 73 km et 1 h 15 ? » « Je pensais être emporté et avoir les jambes broyées »

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