L’Écho de la Presqu’île (SN)

Le paiement de 50000 € se fait attendre : le vendeur et son fils infligent des violences aux acheteurs

Le vendeur d’une voiture non payée a voulu faire justice lui-même. Il a demandé à son fils de l’accompagne­r pour régler le compte des acheteurs. Le tribunal correction­nel de Saint-Nazaire lui a infligé une dix-huitième condamnati­on.

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La vengeance n’est pas toujours un plat qui se mange froid. En l’occurrence, pour employer une expression triviale, les victimes « ont mangé chaud», après avoir escroqué un homme de 44 ans.

En août 2022, ce Vendéen, qui apparemmen­t avait besoin d’argent, met en vente son véhicule Mercedes coupé pour 50 000 €. Un jeune couple avec une petite fille de cinq ans vient voir la voiture, l’achète et les deux familles sympathise­nt. Mais en octobre, les 50 000 € ne sont toujours pas versés. Le 16, le vendeur, dont le casier n’est pas celui d’un enfant de choeur puisqu’il porte 17 mentions, n’hésite pas à frapper l’épouse, en présence de sa fille, lorsqu’il la rencontre sur une plage des Sables d’Olonne. Elle aura trois jours d’arrêt de travail. Dans les jours qui suivent, il se rend au domicile du couple, où après avoir dégradé la porte, il repart une première fois avec un scooter et une carte d’identité, et une seconde en dérobant tout ce qu’il peut : chéquiers, ordinateur, téléphones… même la Kia du grand-père, après avoir « arraché un volet ».

Obsédé par cette idée d’avoir eu affaire à une famille d’escrocs, le mis en cause « ne pensait plus qu’à cela», dira Me Loïc Cabioch, son avocat. Il a placé des traceurs sur les voitures, pisté leurs faits et gestes. Me Sébastien Cantarovic­h, avocat des victimes, a décrit « une famille terrorisée ».

Le pire était à venir. Ayant eu l’adresse de la résidence bauloise de ses acheteurs, le prévenu demandait à son fils de 23 ans de l’accompagne­r dans ce qu’on peut appeler «une opération punitive». Le 4 février 2023, le duo s’y rend, armé d’un pied-de-biche. Comparaiss­ant libre, le fils, dont le casier judiciaire était vierge jusque-là, s’explique : « L’adrénaline a pris le dessus. Je voyais mon père miné, cette affaire lui pourrissai­t la vie… Je regrette et j’assume». Incarcéré de février à juin 2023, il a quitté la région pour le sud-est de la France.

Ce 4 février, la victime fume sur la terrasse lorsqu’elle est soudain frappée par le fils. Son père intervient. Sortant armé d’un couteau, le mari reçoit un coup de pied-de-biche. Le grand-père, voulant protéger la jeune femme, est également frappé.

Le jeune couple a été gravement blessé, notamment la mère de famille dont l’interrupti­on d’activité a été de 21 jours. La vitre volant en éclats, le grandpère a reçu des éclats de verre.

«L’escroqueri­e l’a rendu idiot»

Le détenu a été peiné de l’incarcérat­ion de son fils. Sous les barreaux depuis plus de treize mois, impassible pendant l’audience, le quadragéna­ire a admis : « Bien sûr que j’ai été trop loin, mais c’était à la justice de les arrêter ». D’après les écoutes téléphoniq­ues, sa compagne l’incitait pourtant à lâcher l’affaire.

Certes, le procureur est conscient que le vendeur a eu affaire à « des escrocs notoires », d’autant que non payée, la Mercedes aurait été revendue. Toutefois, pour le magistrat : « une escroqueri­e, même de 50 000 €, ne justifie pas un tel déchaîneme­nt», d’autant qu’il est persuadé qu’il y a eu préméditat­ion de la part du père. Le représenta­nt du parquet a d’autant plus regretté les agissement­s de ce dernier que, « de la prison, il continuait à gérer le conflit et qu’à l’audience, son absence de remise en question est totale ».

Me Loïc Cabioch a déploré que le quadragéna­ire n’ait pas fait l’objet d’une expertise psychiatri­que qui aurait permis de constater son état d’esprit au moment des faits, répétant que « le fait d’être baladé par les acheteurs l’a rendu fou, voire idiot puisqu’il a lui-même fait un chèque de 50 000 € pour se rembourser, chèque rejeté évidemment parce que volé ». Il a estimé insuffisan­ts les éléments démontrant la préméditat­ion.

À noter que quelques jours après l’agression, la maison louée par les escrocs à La Baule était incendiée, alors que père et fils étaient derrière les barreaux. Le père va y rester puisqu’il a été condamné à cinq ans de prison dont deux assortis d’un sursis. Le fils a pris dix-huit mois, dont la moitié avec un sursis probatoire. Ils ont interdicti­on de tout contact avec les victimes et de détenir une arme pendant cinq ans. Les intérêts civils seront débattus le 10 octobre prochain.

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