Sur le toit de la base sous-marine, le Radôme reprend vie avec une expo du Grand Café
Le centre d’art contemporain de Saint-Nazaire quitte les murs du Grand Café, le temps d’une expo dans le Radôme. Ce qui redonne un souffle de vie à ce lieu insolite.
Le Radôme ? C’est cette forme étrange posée sur le toit de la base sous-marine à Saint-Nazaire. Un lieu chargé d’histoire, largement méconnu et sous-utilisé, qui aujourd’hui reprend vie grâce à une exposition hors les murs du Grand Café. Le centre d’art contemporain accueille une oeuvre du jeune artiste Roy Köhnke. La belle sucette ou comment diviser la terre est à voir jusqu’au dimanche 28 avril 2024. Et c’est gratuit.
Première exposition du Grand Café
Sur le toit de la base sousmarine, c’est un endroit à part. Dans ce décor lunaire se détache cette forme géodésique, en bâche anciennement blanche, marquée par les années. Il s’agit en fait de l’ancien radôme de la tour de contrôle de l’aéroport de Berlin-Tempelhof, voué à la destruction avant d’être donné à Saint-Nazaire et posé sur le toit de la base sous-marine en janvier 2007. Depuis, pas grandchose ou presque. Quelques ateliers, deux ou trois événements Silent disco du Vip, et c’est tout.
On y accède par le même escalier que le Vip… avec quelques étages en plus. Le coup d’oeil vaut bien l’effort. «C’est un endroit très particulier, auquel on a pensé assez vite lorsque l’on a cherché un lieu d’exposition», souligne Sophie Legrandjacques, qui y avait déjà organisé des ateliers, mais jamais d’expositions. De là à y voir un rendez-vous régulier, il y a encore un pas de géant, la directrice du Grand Café précisant que « ce n’est pas prévu ». Ce qui rend l’exposition de Roy Köhnke d’autant plus exceptionnelle.
Des fresques qui s’insèrent dans le décor
Car La Belle Sucette a été imaginée et créée spécifiquement pour le Radôme. « C’est un endroit assez fou, marqué par son histoire et dont l’architecture renvoie à beaucoup de choses. La géodésie, c’est ce qui permet par exemple de calculer des surfaces sur le globe. Cela ramène à la division de la terre et les conséquences de son appropriation ».
Habitué plutôt à la sculpture, l’artiste — révélation Arts plastiques 2022 au salon de Montrouge — a préféré pour cette oeuvre le dessin. Deux grandes fresques hautes de 2,40 m, longues de 16 m pour l’une, 8 m pour l’autre. Avec un papier « imbibé à la cire d’abeille », ce qui lui donne une teinte se rapprochant de celle du toit, l’oeuvre ne serait pas complète sans les réflecteurs pendus, « comme des percées, des déformations visuelles et pourquoi pas temporelles», et surtout sa partie sonore.
S’emparer d’un sujet pour le comprendre
Roy Köhnke a ainsi écrit un monologue, parlant au nom d’une intelligence artificielle qui « prend sa liberté, en réglant ses comptes avec l’humanité ». Le tout avec « un ton sarcastique, en tout cas, c’est comme cela que je l’ai conçue. Mais on peut y voir plusieurs niveaux d’humeur ». Tout comme les visages changeant sur une ligne temporelle, aux multiples expressions comme des émoticônes. « Comme pour chacune de mes oeuvres, je m’empare du sujet parce que je me sens dépassé, ou j’ai envie de comprendre. Je ne suis pas technophobe, mais j’aime interroger le rapport du corps à la technologie ».
Autant dire que le Radôme, abri des radars de l’Otan en son temps, était bien le lieu idoine.
Coralie DURAND