Retrouvailles entre coaches
Le choc de ce soir est aussi la confrontation de deux entraîneurs à l’histoire liée depuis le jour où le Breton n’avait pas sélectionné le Messin au pôle Espoirs de Talence.
“J’étais passionné de hand, très investi, ,, bien sûr que j’avais beaucoup pleuré
EMMANUEL MAYONNADE
Emmanuel Mayonnade a prévenu d’entrée, « il n’y a pas de mélodrame là-dedans, moi ça me fait sourire » . Pourtant, à l’heure de se rendre à Brest ce soir (20 h 45) pour le choc du Championnat entre deux équipes qui ont tout gagné, l’entraîneur de Metz va aussi retrouver son homologue qui l’avait beaucoup fait pleurer, en 1998.
«Manu» est alors un jeune demi-centre (15 ans) prometteur, capitaine de la sélection d’Aquitaine managée par Laurent Bezeau, et postule au pôle France de Talence (Gironde) où sont regroupés les meilleurs espoirs régionaux sous la direction de ce même Bezeau. L’examen se passe sous l’oeil d’un jury d’entraîneurs, l’actuel coach de Brest ayant le dernier mot. « Manu était le capitaine de l’équipe de Ligue, dit-il, ce qui montre la confiance que j’avais dans le joueur. Il avait déjà une culture handball. »
Quand la lettre de réponse arrive dans la boîte aux lettres des Mayonnade, famille qui a fondé le club de Mios-Biganos (actuellement en N1, soit la troisième division féminine), le fils s’isole dans sa chambre pour l’ouvrir. Et s’effondre. « Il y avait trois groupes, rembobine-t-il. Le premier, ceux qui étaient sûrs d’être pris. Le deuxième, ça dépendait de qui se désistait. Le troisième, tu restes à la maison. Je regarde le premier groupe, rien. Le deuxième, je n’y suis pas non plus. J’étais tout à la fin du dernier groupe, j’ai même cru qu’ils m’avaient oublié! J’étais passionné de hand, très investi, bien sûr que j’avais beaucoup pleuré. Et derrière, il fallait l’annoncer à mes parents... » « C’est un ensemble de facteurs qui faisaient qu’il n’avait pas été retenu » , tente de se souvenir Bezeau (52ans).
Retrouvailles pour l’examen d’entraîneur
Le rêve d’une carrière de joueur s’envole mais sans aigreur, car Mayonnade voit le fossé se creuser avec ses coéquipiers pris au pôle. « C’est une évidence que je n’aurais jamais fait de haut niveau » , comprend-il très vite. Mais le gamin demeure investi et multiplie les séances d’entraînement, notamment avec les professionnelles de Mios-Biganos (en D1 à l’époque) coachées par son oncle, Dominique. « Il me récupérait après les cours, tous les soirs. Pendant les dix minutes de route, il m’expliquait ce qu’on allait faire en séance. Puis il me débriefait au retour: “Je m’attendais à ça, finalement j’ai vu ça.” Ç’a généré chez moi cette vocation d’entraîneur.»
Sa carrière de joueur stoppée à 21 ans par deux grosses blessures au genou droit, alors qu’il évoluait à Caudéran (troisième division), il se retrouve propulsé sur un banc de touche au décès de son oncle, quand il n’a que 23 ans (37ans aujourd’hui). Bezeau est alors cadre technique en région Centre et va recroiser Mayonnade, encore en tant que président du jury, cette fois pour le diplôme d’entraîneur (BE1) que le Girondin passe, à Orléans.
« Je lui avais mis une très bonne note sur la partie pratique» , sourit le
Brestois, qui a toujours gardé un oeil sur ce jeune technicien en devenir : « Forcément, je le suivais. C’est un plaisir de voir le grand entraîneur qu’il est devenu, jusqu’au titredechampiondumonde( en2019, avec les Pays-Bas). Sa recherche du haut niveau l’a aidé à se construire comme grand entraîneur.»
Coaches respectifs de Brest et de Metz, Laurent Bezeau (à g.) et Emmanuel Mayonnade vont à nouveau voir leurs routes se croiser ce soir pour le choc de la 10e journée.