Tottenham, un bon exemple à suivre
Adoré à Tottenham, où il a laissé un très bon souvenir, Mauricio Pochettino pourrait piocher dans ce qui a fait sa réussite en Angleterre pour bâtir son équipe au PSG.
Le transfert des idées de jeu, d’un club à un autre, explique souvent la nomination d’un entraîneur. Thomas Tuchel avait séduit les dirigeants parisiens grâce au jeu produit par le Borussia Dortmund sous sa direction (2015-2017). Mais en deux ans et demi à Paris, le technicien allemand n’est jamais parvenu à installer ses principes durablement dans l’ADN du PSG. Unai Emery (2016-2018) avait connu le même écueil. En passant d’un bon club à un mégaclub aux rêves de Ligue des champions, l’Espagnol avait buté sur les ego, les envies et les habitudes des joueurs.
À Tottenham (2014-novembre 2019), Mauricio Pochettino était plus grand que les joueurs. Et le jeu prôné ne changeait pas en fonction des hommes. Les Spurs agressaient l’adversaire, le harcelaient dans son camp, dans des systèmes variés et adaptés. L’Argentin a multiplié les organisations tactiques, répondant au contexte proposé par l’opposition : 4-2-3-1, 4-4-2 losange, 3-5-2, 3-4-3, les supporters londoniens ont tout vu en cinq ans, y compris des systèmes évoluant entre la phase défensive et offensive, un mécanisme qui ne devrait pas surprendre les joueurs parisiens. Tuchel en était un adepte.
Tottenham était une machine à presser
C’est peut-être l’évolution et l’utilisation de Marquinhos qui resteront la grande réussite de son passage, même si elles ont fait débat. Mobile, intelligent, assez propre techniquement pour s’insérer au milieu, Marquinhos a exploité son énorme volume de jeu pour apporter au PSG sur deux lignes. Il a terminé l’année 2020 par deux performances gigantesques, contre Lille (0-0, le 20 décembre) et Strasbourg (4-0, le 23 décembre), donnant parfois l’impression que Paris jouait à douze.
Son profil plaira certainement à Pochettino, qui apprécie les joueurs capables de passer d’une ligne à l’autre. À Tottenham, Éric Dier jonglait entre ligne défensive et rôle devant la défense, d’un match à l’autre ou en cours de match. Et l’Anglais savait défendre en avançant, un concept capital pour son ancien entraîneur (qui pourrait donner plus de temps de jeu à Idrissa Gueye), et que les Parisiens, notamment les attaquants, devront réapprendre. Harry Kane, De le Al li, Heung-min Son et Christian
Eriksen (aujourd’hui à l’Inter) ont cavalé entre 2014 et 2019 pour faire de Tottenham une machine à presser.
À Paris, le projet de jeu de Pochettino dépendra grandement de sa force de persuasion. S’il réussit à impliquer Neymar et Kylian Mbappé dans l’effort sans ballon, de façon systématique, le style entrevu à Londres émergera à Paris. Sans travail défensif de son premier rideau, l’intensité exigée par Pochettino s’éteindra rapidement.
Devant, il prône un « désordre contrôlé »
En phase offensive, coach aux influences nombreuses, dont celle de Marcelo Bielsa, qui l’a repéré dans sa jeunesse et inspiré à l’âge adulte, l’Argentin prône un «désordre contrôlé» . Ses joueurs sont invités à permuter pour se créer mutuellement des espaces. Poch et tin on’ apprécie pas un football aux positionnements trop figés et il n’est pas un fanatique du jeu de position, qu’il envisage uniquement s’il peut compter sur des joueurs aptes à le développer.
Néanmoins, ses équipes aiment ressortir le ballon proprement, ses défenseurs centraux doivent prendre des initiatives balle au pied, en cassant les lignes adverses par la passe ou la conduite de balle, et ses milieux évitent généralement de décrocher sans raison. Ce qui devrait plaire à PresnelKimpembe.
Au milieu, l’équation est plus incertaine : qui bougera assez pour permuter? Si Neymar hérite de la même liberté accordée à Eriksen à Tottenham pour décrocher et dézoner, Pochettino devra trouver des hommes assez mobiles pour prendre sa place entre les lignes, et cesser de dépeupler ces intervalles que seule la relation Verratti-Neymar sait utiliser.
Dans les couloirs, les latéraux ne devraient pas être trop chamboulés. Pochettino continuera sans doute dans la voie tracée par Tuchel. Il s’est rarement appuyé sur des ailiers à Londres et n’a aucune raison de changer à Paris, qui n’en compte pas dans son effectif. Les latéraux auront les couloirs, les attaquants l’intérieur du jeu, où il faudra enchaîner les mouvements et attaquer la profondeur pour séduire le nouvel entraîneur. À Tottenham, Kane, Son et Alli se partageaient cette mission. Les courses à haute intensité des deux premiers, réclamées par Pochettino, permettaient à leur équipe d’alterner entre attaque placée et contre-attaque, une polyvalence bien utile à Mourinho aujourd’hui.
La transmission des valeurs chères à Pochettino – l’intensité et la flexibilité, si elle survient – sera particulièrement visible chez les éléments offensifs. Les équipes de Pochettino, comme celles de Bielsa, ont toujours fait partie de celles qui courent le plus en Europe. Le PSG se situe aujourd’hui parmi celles qui courent le moins. De quoi donner une idée du chantier à venir.