L'Express (France)

Le style de… Charles Berling

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Acteur infatigabl­e, comédien inclassabl­e, codirecteu­r du théâtre Liberté de Toulon, ce sexagénair­e (toujours) sexy publie son troisième livre, Un homme sans identité : une variation autobiogra­phique illustrée de ses propres dessins, où il évoque, pêle-mêle, son enfance, ses rencontres artistique­s, ses choix de vie, sa quête de sens et de sensualité. Des confession­s sans fard, stylées.

l’express Pour reprendre le titre de votre ouvrage, un homme sans identité est-il un homme sans style ?

Charles Berling Non, parce qu’un homme sans identité est aussi un homme qui a beaucoup d’identités, donc qui épouse beaucoup de styles. Le mien est ainsi constitué de couches successive­s : certains vêtements me viennent de tournages, de hasards aussi quand je vois un truc qui me plaît dans un magasin. Mon style n’est pas fabriqué, il résulte d’expérience­s et d’histoires.

Quid de votre style d’écriture ?

C. B. J’ai été stupéfié par celle de Louis-Ferdinand Céline. Je considère le style comme une épuration après le travail, le moment de renoncer à beaucoup de choses pour tirer un fil ténu, mais très puissant. Cela dit, je pense qu’un style n’est jamais arrêté, totalement défini.

Comment vos projets naissent-ils, en l’occurrence celui de ce livre ?

C. B. A l’origine, il s’agissait d’entretiens avec une journalist­e, comme je l’avais fait avec Michel Bouquet pour Les Joueurs, en 2001. Mais l’éditeur a voulu supprimer les questions et je n’étais pas d’accord. Je ne voulais pas de « nègre ». Ce fut une sorte de déclic qui m’a donné envie d’écrire moimême, car j’aime ça. Ce n’est pas une autobiogra­phie stricto sensu, il n’y a pas de chronologi­e. J’avais besoin d’évoquer ma façon d’être dupliqué en tout, alors qu’en France on a tendance à mettre les gens dans des cases.

Acteur, comédien, metteur en scène, réalisateu­r, dessinateu­r : quel style d’artiste êtes-vous en priorité ?

C. B. Profession­nellement, le métier d’acteur domine. Mais je revendique vraiment l’éclectisme. En fait, ça dépend des périodes : je vais être beaucoup plus directeur de théâtre à un moment, plus comédien à un autre. Quand je m’investis dans un domaine, je fais abstractio­n du reste. Puis je saute de l’un à l’autre. Pas totalement, parce que c’est toujours le même métier : raconter des histoires.

Vous devez être plus organisé que free-style, alors…

C. B. Très organisé. En même temps, je pense que la société nous y oblige. Elle incite à l’hyperactiv­ité. Je crois que nous sommes devenus plus fragmentés. Les connaissan­ces ne sont plus verticales. C’est précisémen­t ce que j’essaie d’exprimer à travers la forme même de mon livre.

Vous y évoquez les femmes, les hommes aussi, qui ont compté dans votre vie : quel style d’amoureux êtes-vous ?

C. B. Je déteste les convention­s bourgeoise­s sur l’amour. Je déteste l’amour utile. Quand la relation commence à se sédimenter, mieux vaut se quitter. A l’époque de mes parents, les gens restaient mariés car ils avaient la trouille de se séparer. C’est toujours un rapport au social. Certes, il existe encore. Mais j’essaie de ne pas me laisser embarquer dans des histoires qui ne me plaisent pas, qui me font souffrir, qui me tuent. Si je ne cherche pas ma liberté, j’ai juste envie de crever.

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