L'Express (France)

L’affaire Ghosn va-t-elle faire imploser l’alliance ?

- Emmanuel Botta

Un coup de tonnerre qui a frappé simultaném­ent le Japon et la France. Soupçonné de fraude fiscale et d’abus de biens sociaux, Carlos Ghosn, patron de l’alliance Renault-NissanMits­ubishi, no 1 mondial de l’automobile avec 10,6 millions de véhicules écoulés en 2017, dort depuis lundi dans une prison de la banlieue de Tokyo. Il a, dans la foulée, été démis de ses fonctions de président de Nissan et de Mitsubishi. Si Renault lui conservait sa confiance à l’heure où nous rédigions ces lignes, on voit mal comment le Franco-Libanais peut espérer se maintenir au volant de l’alliance, alors que le dossier d’accusation s’épaissit de jour en jour. La coalition de constructe­urs, unique au monde par sa taille, pourrait donc être la victime collatéral­e de ce scandale, tant son président en est depuis près de vingt ans la clef de voûte. « Elle sera difficile à gérer sans Carlos Ghosn », a d’ailleurs convenu le directeur général de Mitsubishi Motors, Osamu Masuko, tandis que chez Nissan les dirigeants ne cachent plus leur volonté de profiter de l’occasion pour rééquilibr­er l’alliance. Renault détient en effet 43 % du capital du japonais, tandis que Nissan ne détient que 15 % du français, et surtout aucun droit de vote. Or l’équilibre capitalist­ique de 1999 – Nissan était alors au bord de la faillite – ne traduit plus la réalité opérationn­elle actuelle : le constructe­ur de l’archipel réalise un chiffre d’affaires nettement supérieur à celui du français (93 milliards d’euros, contre 58,8 milliards pour le français en 2017). De là à ce que la coalition implose, il y a un pas que l’on ne franchira pas. En effet, rien que sur l’année 2017, l’alliance a permis à Nissan et à Renault de réaliser 58,8 milliards d’euros d’économies grâce aux synergies mises en place.

60 % de leurs véhicules sont en effet issus des mêmes plateforme­s de production. « Détricoter l’ensemble leur coûterait une fortune, et les rendrait extrêmemen­t fragiles, alors que le secteur subit une triple révolution : électrique, autonome et connectée », souligne Jean-Pierre Corniou, directeur général adjoint chez SIA Conseil. Reste maintenant à trouver un patron potentiel, connaissan­t à la fois Renault et Nissan, et fin connaisseu­r de la culture japonaise… Voilà qui fait furieuseme­nt penser à l’ex-bras droit de Ghosn et actuel patron de PSA, un autre Carlos : Tavares.

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Union Le remplaceme­nt du patron de Renault-Nissan-Mitsubishi pourrait tout au plus modifier l’équilibre établi.

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