L'Express (France)

MARMANDE : UNE COLÈRE NÉE À L’OMBRE DE BORDEAUX

A 90 kilomètres de la capitale girondine, les gilets jaunes dénoncent la hausse des prix, mais aussi le « tout-métropole «. Et pourtant…

- Par Michel Feltin-Palas, avec Pierre Falga et Anne-Sophie Mauffré-Rochelet (photos)

L «’argent, dans ce pays, il y en a. Mais Macron préfère le prendre dans la poche des petits et supprimer l’ISF de ses copains les riches. » Sur le rond-point du Leclerc de Marmande, Jean-Jacques fulmine. Voilà des jours et des jours que cet ancien artisan boucher, « ruiné par le RSI », la Sécu des indépendan­ts, organise avec ses copains des barrages filtrants. Des jours qu’il se mobilise « pour qu’enfin les choses changent et que ceux d’en haut pensent un peu à nous ». Des jours qu’avec lui la sous-préfecture de Lot-et-Garonne, de tradition radsoc, connaît des temps tourmentés.

Ici comme ailleurs, le prix des carburants et le pouvoir d’achat ont servi de détonateur. « Je l’ai expliqué à mes enfants, témoigne Cristelle. Si, tous les soirs, maman est absente de la maison, c’est pour être capable de vous acheter des gâteaux et du Nutella. » Mi-gasconne, mi-andalouse, Cristelle ne manque ni d’énergie ni de courage. Micro-entreprene­use, elle assure le secrétaria­t d’agriculteu­rs, entretient des jardins, nettoie des véhicules, mais elle le dit tout net : « Avec mon conjoint, on touche 2200 euros par mois. Et on ne s’en sort pas. »

Ici comme ailleurs, à hauteur du barrage, il arrive qu’un automobili­ste râle de temps à autre, mais les approbatio­ns l’emportent largement. « On nous apporte du café et des croissants, on nous lance des mots d’encouragem­ent. Franchemen­t, cela fait chaud au coeur », témoigne Christophe. Il arrive même que des militaires, officielle­ment tenus au devoir de réserve, lèvent le pouce en signe de soutien…

Ici comme ailleurs, le mouvement a permis d’exprimer un ras-le-bol général. Et tout y passe : les « salaires des députés, qu’il faudrait diminuer de moitié », « les 40 voitures qui ont suivi Macron pendant son voyage dans le nord et l’est de la France », la « situation dans les Ehpad, où l’on n’a même pas assez de couches pour changer les personnes âgées ». Sans oublier « les profiteurs du système », qui hérissent ceux qui le financent par leur travail et leur honnêteté. « J’ai commencé à travailler à 14 ans, d’abord en usine, puis comme cantinière dans les écoles. Aujourd’hui, je touche une retraite de 800 euros par mois, raconte Françoise. Et dans mon village, un couple de

« Ils sont tous incompéten­ts, à droite comme à gauche. C’est bien le problème »

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