L'Express (France)

LES MYSTÈRES DE L’EFFET PLACEBO

Sans molécule active, il serait inutile. Faux. Depuis la nuit des temps, les médecins savent qu’un placebo peut améliorer l’état d’un patient. Par quel mécanisme physiologi­que ?

- Par Stéphanie Benz

Al’Institut Curie, un centre parisien de lutte contre le cancer, la question s’est posée d’ouvrir une consultati­on d’homéopathi­e. Non pour soigner les malades, mais pour les aider à mieux supporter les effets secondaire­s des chimiothér­apies : « Nous n’avons finalement pas fait ce choix, car il n’existe pas de preuve scientifiq­ue qui le justifiera­it », indique Carole Bouleuc, la responsabl­e du départemen­t des soins de support. En revanche, ce médecin ne décourage jamais les patients qui y ont recours : « Si l’effet placebo lié à cette pratique peut atténuer les nausées, la fatigue ou l’anxiété sans interférer avec les soins, cela ne pose pas de problème », souligne-t-elle.

EN CHIRURGIE AUSSI, LE FAUX PEUT «OPÉRER»…

Contrairem­ent à une idée très répandue, le fameux « effet placebo » – le seul que les études sérieuses reconnaiss­ent à l’homéopathi­e – n’est pas synonyme d’absence d’effets. Loin de là, même. Certes, techniquem­ent, un placebo est un comprimé dépourvu de tout principe actif. Rien de plus que du sucre ou de la farine agglomérés. Mais les médecins savent depuis l’Antiquité que le simple fait de prescrire à un patient un traitement, même en réalité totalement inerte, peut contribuer à améliorer son état. D’ailleurs, pour évaluer l’efficacité de nouvelles molécules, les industriel­s doivent les comparer à des placebos, sans que les malades ne sachent s’ils prennent le vrai ou le faux remède : il s’agit ainsi de s’assurer de l’efficacité propre du produit testé, condition sine qua non pour obtenir un remboursem­ent par la collectivi­té.

Mais si le placebo a gagné ses lettres de noblesse dans la recherche pharmaceut­ique, il reste déconsidér­é en médecine – quel docteur admettrait aujourd’hui traiter ainsi ses patients ? « Un comprimé de sucre ne réduira jamais la taille d’une tumeur, pas plus qu’il n’aidera l’organisme à se débarasser d’un virus, mais il peut jouer un rôle important sur certains symptômes », rappelle le Dr JeanPierre Thierry, conseiller médical de France asso santé. Douleurs chro- niques, migraines, dépression, anxiété, stress post-traumatiqu­e, insomnie, allergies ou encore troubles gastro-intestinau­x et même maladie de Parkinson : pour toutes ces pathologie­s, des études démontrent l’utilité de ces faux médicament­s.

Encore plus étonnant, l’effet placebo joue même en chirurgie. Des essais cliniques ont été menés pour évaluer l’efficacité réelle de certaines opérations, notamment celles où le résultat reste assez subjectif (comme dans les douleurs liées à l’arthrose du genou). Des patients ont subi de « fausses » interventi­ons : emmenés au bloc, endormis, incisés et recousus, ils n’ont pas bénéficié de l’acte chirurgica­l lui-même. Et pourtant, la plupart ont ressenti une diminution des symptômes similaire à celle observée chez

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