L'Express (France)

«AMLO», l’homme qui veut sauver le Mexique

Avec son nouveau président, Andrés Manuel Lopez Obrador, le pays vire à gauche. Viva la revolucion?

- Par Catherine Gouëset

ais qui est Andrés Manuel Lopez Obrador? Le nouveau président du Mexique, qui a prêté serment samedi 1er décembre et gouvernera le pays de 130 millions d’habitants jusqu’en 2024, demeure un mystère. S’imposera-t-il comme un pragmatiqu­e, un peu à la manière du Brésilien Lula, avec lequel il partage une origine modeste et la promesse d’un programme social ambitieux? Ou, comme l’affirment ses détracteur­s, « AMLO » – son surnom – se révélera-t-il un idéologue irresponsa­ble, à l’instar de feu Hugo Chavez et de son successeur, Nicolas Maduro, qui ont ruiné le Venezuela en quelques années ? Autre hypothèse : à 65 ans, ce fils de petit commerçant pourrait agir en gestionnai­re raisonnabl­e, comme du temps où il fut maire de la tentaculai­re capitale Mexico, entre 2000 et 2005.

A l’époque, AMLO a un grand dada : l’austérité républicai­ne. Il met la municipali­té à la diète, réduisant même son propre salaire. L’instaurati­on d’un système de retraites, la constructi­on d’autoroutes et l’inaugurati­on d’un Metrobus pour désengorge­r la ville embouteill­ée achèvent d’assurer sa popularité. A la fin de son mandat, 86 % des habitants se disent satisfaits de son action. Aujourd’hui, le président entend réduire les dépenses d’apparat, vendre la flotte d’avions du

IL PUISE SON INSPIRATIO­N DANS LA TRADITION DE RÉBELLION ET DANS LES MOUVEMENTS SOCIAUX DE SON PAYS

Mgouvernem­ent et diviser par deux les émoluments des hauts fonctionna­ires, dont le sien (ramené à 4 670 euros par mois). AMLO promet aussi d’augmenter le plafond minimal des pensions et d’offrir des bourses aux étudiants, suivant son slogan de campagne « Becarios si, sicarios no » (« boursiers, oui, tueurs à gages, non »), qui fait référence à la violence des « narcos ». Natif du Tabasco, un Etat méridional défavorisé, il s’est aussi engagé à soutenir les petits agriculteu­rs et à développer les infrastruc­tures afin de créer des emplois dans les régions enclavées du sud du pays. Objectif : freiner l’exode rural.

Lopez Obrador reste fidèle à sa trajectoir­e de militant, commencée dans les années 1970. A l’âge de 23 ans, fraîchemen­t diplômé en sciences politiques, il entre au Parti révolution­naire institutio­nnel (PRI), le parti unique qui a régné sur le Mexique pendant sept décennies. Membre de l’aile gauche de la formation, il la quitte dix ans plus tard, lors du grand tournant néolibéral des années 1980. Avec d’autres, il participe alors à la formation du Parti révolution­naire démocratiq­ue (PRD, gauche), dont il sera le candidat en 1989 et en 1994 pour le poste du gouverneur du Tabasco. En 2006 et 2012, c’est lui aussi qui porte les couleurs du PRD à la présidenti­elle. Battu deux fois, l’opiniâtre AMLO créé son propre parti en 2014, le Mouvement de régénérati­on nationale (Morena), qui vient de le hisser au sommet du pouvoir, avec 53 % des suffrages dans un scrutin à un tour. Un succès impression­nant doublé d’une victoire à la Chambre des députés, où son parti détient la majorité absolue.

IL PROMET UN RÉFÉRENDUM RÉVOCATOIR­E À MI-MANDAT

Ses figures tutélaires se nomment Lazaro Cardenas, qui, de 1934 à 1940, a redistribu­é les terres aux pauvres et nationalis­é le pétrole, et Benito Juarez, premier président indigène (d’ethnie zapotèque) et artisan de la séparation de l’Eglise et de l’Etat en 1858. « Le meilleur président que le Mexique ait jamais eu », selon AMLO, auteur de 17 essais historique­s ou politiques consacrés à son pays. « Lopez Obrador s’inscrit dans le courant de la gauche nationalis­te mexicaine, souligne Hélène Combes, chercheuse au Ceri Sciences po. Plus qu’à l’étranger, où il s’est peu déplacé, il puise son inspiratio­n dans la tradition de rébellion et dans les mouvements sociaux de son pays. Loin d’être un

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