La Maison-Blanche en demi-teinte
Le président Bush prend un départ prudent. A la tête d’une équipe où les pros l’emportent sur les idéologues.
Pour sortir de l’ombre géante de Ronald Reagan, George Bush, dit l’« homme invisible », avait bien besoin d’un gigantesque feu d’artifice. Il l’a eu. […] Les festivités […] étendues sur cinq jours, ont coûté la somme superlative de 37 millions de dollars, soit 230 millions de francs. Oui, 23 milliards de centimes. Mais il fallait plus que de l’argent, de l’entregent […] pour être parmi les 50 000 privilégiés autorisés à l’entourer, au pied du Capitole. […]
Moins spectaculaires seront les débuts de la nouvelle administration. La promesse du candidat Bush […] de ne pas augmenter les impôts lui interdit pratiquement de tenir les autres, compte tenu du déficit budgétaire. Et le Congrès, […] plus que jamais dominé par les démocrates, n’ira pas tirer les marrons du feu pour le président Bush. […]
C’est un trait de l’Amérique : le pardon des péchés. Même si Bush s’est autorisé tous les coups, même les plus bas […], il a gagné. Seul compte le résultat. Lui, le « wimp » (poule mouillée), l’éternel second, pour ne pas dire l’éternel perdant, a triomphé de tous ses adversaires […].
e voici transfiguré. Magie de la MaisonBlanche : c’est la fonction qui fait le président. […] Si l’on veut bien faire la part des concessions de rigueur – une femme, un Noir, deux Hispaniques – le reste des 14 « ministres » de l’administration est mâle, blanc, rompu au fonctionnement de la machine gouvernementale, et de ses deux branches, exécutive et législative. Il réside de longue date à
LWashington DC […]. Comme le patron. Et comme James Baker.
Ce James Baker sans qui George Bush ne serait certainement pas le 41e président des Etats-Unis. […] En 1980, l’ex-avocat de Houston dirige la campagne de son ami George, aux prises avec Reagan dans les primaires républicaines. Il saura le convaincre de décrocher à temps. Bien vu : Ronald fera de Bush son vice-président et de Baker le secrétaire général de la Maison-Blanche.
ames abandonne ses fonctions de secrétaire au Trésor […] pour prendre en main la campagne de Bush, mal partie. On connaît la suite. […] Bush a atteint son objectif. Mais Baker? Spectacle fascinant : l’amitié entre les deux hommes va-t-elle survivre aux tensions du pouvoir conquis ?
A ceux qui voient en Baker une sorte de super-Premier ministre d’un président sous influence […], George Bush a très vite apporté une réponse tranchante. Le patron, cette fois, c’est moi ! Baker avait un candidat pour le poste de secrétaire général de la présidence, Craig Fuller, brillant tacticien.
Eliminé froidement, au profit de l’imprévisible gouverneur du New Hampshire, John Sununu : tempérament emporté, méconnaissance des moeurs politiques washingtoniennes. « Au moins, faites-le encadrer par deux adjoints », suggère Baker. En vain. Première anicroche. L’ami pourrait bien se transformer en rival, lorsque l’Amérique se cherchera un nouveau président, dans moins de quatre ans.
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