L'Express (France)

BRAVES GENS DU PURGATOIRE

- S. B.

PAR PIERRE PELot. HÉLoïSE D’oRMESSoN, 512 P., 22 €.

18/20

Bagouzes et santiags, le poil en maquis pris par la neige, Pierre Pelot porte volontiers le galure et coupe son bois, perché entre les épaules des Vosges. Homme de la terre, des arbres, du vent et des aurores blondes, il pince la lumière en tableaux divins et la saupoudre en écrits, tous les écrits possibles. quelque 200 en cinquante-trois ans de carrière, dont L’Eté en pente douce et l’inouï C’est ainsi que les hommes vivent. Pelot sait conter à digues rompues les soubresaut­s des êtres. Leur fiel, leur flambe, leur tournis, leur noirceur. Hors le temps et de nos jours dans Braves Gens du Purgatoire. A la saignée des montagnes, des vallées comme des entailles, le printemps enroué par l’hiver et des chamailles de familles frissonnan­t de fantômes. Dans le village de Purgatoire, le vieux Bansher s’est pendu après avoir abattu sa moitié, une Derandier. Mise en scène, marmonnent les leurs. Ils ont été tués parce qu’ils en savaient trop. trop sur quoi, sur qui ? demande en vain la jeune Lorena Bansher. Début d’une saga vertigineu­se, pentue, qui se dégringole et s’escalade d’un siècle l’autre, à bout d’haleine, le coeur à l’envers. Des clans rancuneux s’affrontent, infamies muselées en héritage. Les spectres du passé s’agitent entre les silences à fusils sortis. Nul ne les connaît autant que l’écrivain Simon Clavin, ermite au couchant de sa vie, mémoire tisonnée par Lorena. Bourru et le regard bancal, il a des airs de Pierre Pelot. Dont ce serait là l’ultime roman. Avec ses nuages au ventre lourd et ses autrefois barbares que toisent les cathédrale­s de roche, ses humains batailleur­s ficelés en prose noueuse, torrentueu­se, de râpe et de velours. Déchirante après tout, après qu’un moribond magnifique s’en est allé rejoindre les ombres.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France