Le Venezuela, test de puissance
S «i les Américains envahissent le Venezuela, ils auront un Vietnam, pire que ce qu’ils imaginent. » Prononcée le 30 janvier, cette menace de Nicolas Maduro semble largement exagérée. Certes, selon l’Institut international pour les études stratégiques (IISS), basé à Londres, l’armée vénézuélienne aligne
351 000 soldats. A titre de comparaison, lors de l’invasion en 1989, le Panama avait opposé 21 000 hommes aux forces militaires. Toutefois, la poignée d’officiers ayant déjà lâché Maduro pour reconnaître le président par intérim Juan Guaido affirme que 90 % des effectifs de l’armée sont prêts à les imiter. De plus, l’armée vénézuélienne, quoique mieux entraînée et équipée que par le passé, n’a aucune expérience du combat. Surtout, à la différence du Vietnam, 83 % des Vénézuéliens aspirent au départ de Maduro, selon Meganalisis. Enfin, Washington peut compter sur l’appui tactique des deux voisins du Venezuela : le Brésil, désormais dirigé par Jair Bolsonaro, et la Colombie, allié traditionnel des Américains. Un simple prétexte suffirait à déclencher une action américaine – l’enlèvement de diplomates des Etats-Unis, par exemple, ou la démonstration, comme ce fut le cas au Panama, que le Venezuela est un narco-Etat. Un succès militaire rapide favoriserait à coup sûr la cote de popularité de Donald Trump, notamment parmi les exilés latinos. Mais, contrairement à l’idée reçue, le président américain est un businessman dans l’âme qui préfère les deals négociés aux conflits armés. Restent deux autres scénarios. Le premier : cédant à la pression internationale, Maduro organise des élections, les perd et part en exil, par exemple à Cuba. Le second : il joue la montre, gagne du temps, multiplie les manoeuvres dilatoires, avec l’appui diplomatique de ses alliés (Cuba, Russie, Chine, Iran, Turquie). Et se maintient au pouvoir. Dans ce cas, le Venezuela se transformerait en deuxième Cuba.