Haïti : ça se gâte pour « l’homme-banane »
Un élu en sursis. En butte, depuis le 7 février, à une insurrection populaire contenue au prix d’une répression meurtrière, le président haïtien, Jovenel Moïse, voit son assise s’affaiblir de jour en jour. Pour ce jeune quinqua issu d’une famille modeste, qui accéda à la prospérité grâce au commerce de la banane – d’où son surnom créole de « Nèg Bannan nan », ou « homme-banane » –, les allées du pouvoir ont toujours été jalonnées de chausse-trappes. Poulain de son prédécesseur, Michel Martelly, chanteur populaire saisi par la politique, il collectionnera les revers, entre élection initiale annulée sur fond de fraudes, accusations de blanchiment et grèves générales. Cette fois, l’intense frustration d’une jeunesse sans avenir aura été exacerbée par la sortie d’un rapport de la Cour des comptes de Port-au-Prince détaillant la gestion calamiteuse du fonds Petrocaribe, un dispositif offert dès 2008 par le Venezuela d’Hugo Chavez, permettant à la première République noire de l’histoire d’acquérir des carburants à prix d’ami.
Les laissés-pour-compte du pays le plus pauvre de la Caraïbe, rongé par la corruption et le clientélisme, accablé par les séismes, les ouragans et le choléra, lui reprochent aussi d’avoir trahi sa promesse : « Mettre à manger dans les assiettes et de l’argent dans les poches ». Que répond « Jovenel » ?
Le 14 février, sortant d’un long mutisme, il a fustigé « gangs armés » et « trafiquants de drogue ».