Les tables de François-Régis Gaudry
Il crève l’écran sur M6 et vient d’ouvrir son restaurant à Rueil-Malmaison…
Ce mercredi 6 février, la dixième saison de Top Chef a allumé le feu sur M6. Parmi les 14 candidats à couteaux tirés, un jeune homme se fait remarquer : Baptiste Renouard, 27 ans, le genre de machine de guerre surentraînée pendant ses missions commando auprès de Jean-Louis Nomicos (Lasserre, Paris VIIIe), Joël Robuchon, Yannick Alléno (Le Meurice, Paris Ier) et Alain Pégouret (Le Laurent, Paris VIIIe). Première épreuve : « la revisite d’une entrée traditionnelle de bistrot. » Le cuisinier envoie un maquereau au vin blanc fuselé comme une coque de trimaran : le poisson est cuit dans une nage, les filets sont soigneusement carrossés d’écailles d’oignons rouges et de carottes en pickles, une sauce confortable vient mouiller l’ensemble. Le jury applaudit à l’unanimité. Baptiste Renouard semble bien parti pour faire son bout de chemin dans la compétition.
Quand on apprend que le garçon vient d’ouvrir à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine), on file aussi sec le voir en chair et en os dans son salon de
goût au charme PPP (pierres, poutres et parquet), calfeutré derrière une façade bleue et ocre (Ochre, du grec ancien Okhra). On n’est visiblement pas les seuls à avoir eu cette idée. Sur deux étages, ses 32 couverts sont pris d’assaut! Ceux qui espéraient hameçonner le fameux maquereau au vin blanc se voient répondre : « Le chef pense à le mettre bientôt à la carte ! »
Ils se consolent avec une belle prise, clin d’oeil au mentor Robuchon : l’oeuf mollet, camouflé sous de fins rubans de pâte filo croustillants, libérant son jaune coulant sur une opulente purée de topinambours à l’huile fumée. Au moins aussi convaincant que l’autre entrée du menu déjeuner à 39 € : un velouté de châtaigne à la cardamome et à la livèche jouant, d’une cuillerée à l’autre, l’intensité et la douceur presque pâtissière. En plat, la volaille jaune des Landes promène son suprême extratendre à côté d’une purée de rattes (re-clin d’oeil à Robuchon) corsée par une touche de café. Bémol : la noix fraîche, imperceptiblement râpée sur la viande, fait de la figuration.
En dessert, en revanche, la mandarine tient ses promesses dans le soufflé : ses notes fruitées, surlignées par un trait de Grand Marnier, irradient ce dessert haut-de-forme, au sommet tremblant, saupoudré de sucre glace.
Aussi naturel et sympathique que dans Top Chef, le maître des lieux fait le tour des tables. Il récolte les compliments avec le sourire, mais il demande aussi ce qui pourrait être amélioré. Bon esprit. A deux ou trois petits ajustements près, Baptiste Renouard semble aussi doué pour mettre les petits plats dans l’écran que dans les grands.