Fin de l’A380, Airbus change d’ère
Le plus beau, le plus gros, mais pas le plus facile à vendre. Faute de nouvelles commandes de son principal client, Emirates, Airbus va arrêter la production de l’A380, son géant des airs capable d’embarquer entre 550 et 850 personnes. Quelques minutes avant la publication de ses résultats annuels, le 14 février, l’avionneur européen a lâché le morceau. « Malgré tous nos efforts de ventes auprès d’autres compagnies ces dernières années, on mettra un terme aux livraisons d’A380 en 2021 », a déclaré Tom Enders, président exécutif d’Airbus, qui quittera ses fonctions en 2019, après quatorze années de mandat.
Il y a un an, John Leahy, alors directeur commercial d’Airbus, se montrait
« confiant » sur la renégociation avec Emirates, client historique et quasi exclusif du programme. Mais la compagnie émirienne a revu ses plans, préférant réduire son carnet de commandes d’A380 de 162 à 123 appareils pour privilégier – tiens, tiens ! – les derniers modèles de la maison européenne. A commencer par l’A330neo, le moyen-courrier prisé des compagnies chinoises et turques grâce à ses moteurs nouvelle génération, moins énergivores. Mais, surtout, l’A350, le long-courrier aux 15 000 kilomètres d’autonomie, qui embarque « seulement » 300 personnes en moyenne. Vingt-deux ans après son décollage (en octobre 2007), l’A380 semble déjà d’un autre temps. « Cet avion avait été conçu pour faire des liaisons de “hub à hub” [entre les ports d’attache des compagnies, tels Paris pour Air France ou Dubaï pour Emirates]. Mais qui pouvait imaginer il y a dix ans que le low cost représenterait 80 % du marché ? » expliquait à L’Express en janvier 2018 Gérard Maoui, consultant en aéronautique. Seulement, dans « une industrie de cycle long, c’est toujours compliqué de corriger le tir », ajoute un autre expert du secteur. L’annonce de l’arrêt a été vécue à Toulouse comme un « vrai choc sentimental », confie une source aéroportuaire, « dans la lignée de celui du Concorde et du Mercure de Dassault », mais les nombreux fans de l’A380 pourront continuer quelques années à profiter de son silence à bord. Pour Airbus, dont la décision a d’ailleurs été saluée par la Bourse (l’action a pris 5 % le jour de l’annonce), il était vraiment temps de changer d’ère.