L'Express (France)

Académie française : remous sous la Coupole

L’Académie française ne parvient pas à trouver un successeur au fauteuil de Michel Déon. Une situation de blocage parfois imputée au secrétaire perpétuel, Hélène Carrère d’Encausse. Au point que certains se demandent si elle ne devrait pas passer la main

- PAR JÉRÔME DUPUIS

On a beau être immortel, vingt ans, ça peut finir par paraître long. Voilà bientôt deux décennies qu’Hélène Carrère d’Encausse occupe les fonctions prestigieu­ses de secrétaire perpétuel de l’Académie française. On n’avait plus vu une telle longévité depuis le milieu du XIXe siècle. Alors, dans l’atmosphère

feutrée du Quai Conti, certains habits verts se demandent aujourd’hui à voix basse si la célèbre historienn­e de la Russie, qui fêtera ses 90 ans en juillet, ne devrait pas passer la main, comme l’ont fait ses trois derniers prédécesse­urs. Et puisque l’on est entre gens de lettres, on le murmure avec de jolies formules. « La Tsarine devrait abdiquer », dit l’un. « Il est peut-être temps que la princesse géorgienne rende sa couronne », susurre un autre. « Même le pape Benoît XVI a démissionn­é », sourit un troisième.

Signe de cet agacement, les trois tentatives récentes pour désigner un successeur au fauteuil de Michel Déon se sont traduites par des élections blanches, malgré des candidats de renom (Frédéric Mitterrand, Luc

Ferry, Pascal Bruckner, Charles Dantzig…). « Le système est bloqué, Hélène n’a plus l’autorité suffisante pour susciter des majorités », observe un jeune académicie­n. Pascal Bruckner et François Taillandie­r, ses candidats au fauteuil de Déon, ont été retoqués. « Aujourd’hui, on a parfois l’impression qu’Hélène organise des combats de gladiateur­s : elle jette deux bons candidats dans l’arène et que le meilleur gagne! » regrette un célèbre académicie­n. Conséquenc­e de ce blocage : les élections aux fauteuils de Simone Veil, Jean d’Ormesson et Max Gallo ne peuvent pas être lancées tant que celui de Michel Déon n’est pas pourvu. Même le prestigieu­x New York Times s’est alarmé de cette « impasse » académique le mois dernier.

En bon médecin, Jean-Christophe Rufin, arrivé en 2008, livre son diagnostic : « La maladie la plus largement répandue à l’Académie en ce moment ? C’est l’allergie à un candidat ! » Bruckner? Trop désinvolte. Ferry? Trop sûr de lui. Frédéric Mitterrand?

« Il est peut-être temps que la princesse géorgienne rende sa couronne »

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