L’eldorado africain
L’Afrique est le continent qui suscite aujourd’hui le plus de fantasmes. Le pessimisme a longtemps prévalu. Riche de son sous-sol, mais sans eau, sans électricité, sans routes, elle semblait condamnée à la pauvreté. Puis, en quelques années, ce pessimisme s’est transformé en optimisme béat : le sous-sol est toujours aussi riche. Il n’y a pas davantage de routes, d’électricité ou d’eau… mais l’Afrique a un formidable potentiel de croissance !
Le grand mérite de ce livre est de réévaluer la dynamique africaine à sa juste mesure. Oui, les indicateurs macroéconomiques ont fait des progrès au cours des vingt dernières années : hausse du niveau d’éducation, apparition de grandes entreprises, finances publiques et inflation mieux gérées, émergence d’une classe moyenne. Mais attention : ces performances s’expliquent aux deux tiers par la hausse spectaculaire des prix des matières premières, et pas tellement par les gains de productivité. De fait, les deux auteurs remettent en perspective les rendez-vous manqués de l’Afrique avec la modernisation de l’agriculture, puis avec l’industrialisation, la « verticalité » du continent, traversé par trois climats, qui freine toutes les mobilités…
Autre atout de ce livre : il met en évidence les multiples facettes de la zone la plus hétérogène du monde : 54 pays, 2 000 langues et un écart de revenu allant de 1 à 30 entre le pays le plus riche et le plus pauvre…
Malgré ce constat, que certains jugeront trop pessimiste, les auteurs sont convaincus que l’Afrique, qui comptera 2,5 milliards d’habitants en 2050 (deux fois plus qu’aujourd’hui), est le relais de croissance dont l’Europe a besoin pour se maintenir à flot sur le plan économique et géopolitique face au duopole sino-américain. La prise de conscience est urgente, car la Chine, elle, n’attend pas pour pousser ses pions, en témoigne le spectaculaire décollage de l’Ethiopie, que Pékin a massivement encouragé…