Les tables de François-Régis Gaudry : Daroco 16 (Paris)
Parigi, fan d’Italie ! Ça ne date pas d’hier, mais le phénomène s’accélère. Le groupe Big Mamma a les yeux plus gros que le ventre (8 adresses, de East Mamma dans le XIe à La Felicità du XIIIe), le mégastore Eataly (Paris, IVe) déclenche l’hystérie, Alain Ducasse verse dans la carbonara à prix accessibles (Cucina, Paris Ve)… Même Cyril Lignac, que l’on n’attendait pas franchement sur le terrain de la Péninsule, annonce l’ouverture d’une trattoria pour début 2020.
Pendant ce temps-là, Alexandre Giesbert se ritalise à tout-va. Le jeune restaurateur cultive soigneusement sa passion italophile, italophone et italophage. Après le bistrot italien Roco (Paris, XVIIe) et la trattoria branchée Daroco (Paris, IIe), Alexandre et ses associés Julien Ross et Romain Glize convertissent le Zebra Square, qu’ils avaient relancé en 2018 avec un succès modéré, en méga trattoria-pizzeria à faire saliver tout le XVIe. Le tout premier service – le dimanche 1er septembre au déjeuner – fut un carton plein et la pression ne retombe pas depuis.
La façade bleu électrique, aussi efficace que du papier tue-mouches, et cet espace de 430 mètres carrés, repensé par l’agence Reinh à coups de plafond-miroir et de fresque signée SupaKitch, attirent les clients. Mais la chose qui pourrait bien les faire revenir, c’est la carte, pilotée avec une certaine vista par le chef sarde Federico Schiavon.
Pas mal de bonnes idées dans les bricoles à grignoter : arancini peu réglementaires mais très à l’aise dans leur libre réinterprétation de la boulette de riz sicilienne, et beignets de mozzarella réussis dans le genre comfort food. On n’a pas osé commander le risotto, trop souvent transformé en France en magma épais quand il s’impose dans toute sa fluidité à Milan, mais on n’a pas été déçu par les pappardelle al ragù (17 €) : al dente de rigueur, sauce nappante et cuivrée.
Le clou du spectacle, c’est la pizza. Sincèrement napolitaine. Pâte moelleuse et légère (fermentation de vingt heures), trottoirs joliment boursoufflés, garnitures bien proportionnées. La Margherita est traditionnelle (sauce tomate, mozzarella fior di latte et basilic, 11 €) et les créations sont inspirées. La Parigi se la joue regina haut de gamme (jambon blanc Folacci et champignons de Paris émincés à cru, 16 €) et la Formaggissima ose le fromage au superlatif (mozza, gorgonzola, scamorza fumée, taleggio, ricotta, 16,50 €). Et si cette pizza s’imposait d’emblée comme la belle référence de l’ouest parisien ?