A la recherche du cycle perdu
La récession guetterait les Etats-Unis à l’horizon 2020-2021. C’est en tout cas le scénario envisagé par les trois quarts des économistes américains. Pourtant, si certains indicateurs se retournent, le rouge sanglant ne domine pas sur le tableau de bord de la première économie mondiale. Alors pourquoi ce pessimisme? A cause du cycle bien sûr! Depuis 1945, la boucle récession, reprise, expansion, et rechute a duré en moyenne cinquante-huit mois. Le cycle amorcé en juillet 2009 dure maintenant depuis… cent vingt et un mois, alors forcément la récession va finir par arriver, comme la pluie après le beau temps. Mais, comme le climat, l’économie n’obéit plus aux mécanismes d’antan. Les cycles n’ont certes pas disparu, mais ils sont devenus plus longs et moins amples. D’abord parce que l’inflation a disparu des magasins. Produite par une économie en surchauffe, elle obligeait auparavant les banques centrales à remonter leurs taux d’intérêt pour resserrer le robinet du crédit, provoquant ainsi la récession. Sauf qu’avec la mondialisation de la concurrence et la libéralisation financière ce ne sont plus les étiquettes qui se sont mises à valser, mais la valeur des actions ou les mètres carrés immobiliers. Oui, mais le pétrole? Chaque fois (1973, 1980, 1991, 2008), sa flambée a accouché d’une récession. Certes, mais, au fil des années, les grandes économies occidentales, qui ont chassé les gaspi et diversifié leurs sources d’énergie, sont devenues moins dépendantes à l’or noir. Fabriquer 1 euro de PIB demande moitié moins de brut aujourd’hui qu’au début des années 1970! Surtout, tous les moteurs de la croissance tournent de façon beaucoup plus régulière qu’auparavant. La consommation ? Lissée par le poids croissant des dépenses contraintes (abonnements, transport, loyers…), qui pèsent de 30 à 60 % du revenu mensuel des ménages selon les catégories sociales, 3 fois plus que dans les années 1960. L’investissement des entreprises? Dans une économie de plus en plus dominée par les services, l’effort d’équipement ne consiste plus à moderniser une usine tous les cinq ou dix ans, mais à actualiser en permanence son parc d’ordinateurs et de logiciels.
Les échanges commerciaux ? Dès l’instant où dans un bien fabriqué quelque part il y a 40 % de « made in ailleurs », les dynamiques d’importation et d’exportation ne peuvent plus diverger autant qu’auparavant. Les stocks, enfin, dont l’accumulation dans les entrepôts obligeait parfois les entreprises à ralentir voire arrêter les chaînes de production? Les entreprises travaillent en flux tendu, voire produisent après avoir vendu. Si ce n’est pas un nouveau monde…