L'Express (France)

Un appétit sans limite

La cofondatri­ce de Frichti est la seule femme à diriger une entreprise du Next40, le nouvel indice créé par Bercy pour distinguer les 40 start-up françaises les plus prometteus­es.

- Par Sandrine Chesnel S. C.

« Frichti » : mot populaire un peu désuet, qui évoque la cuisine sans prise de tête, faite au dernier moment avec ce qui tombe sous la main. Depuis avril 2015, Frichti est aussi le nom d’une start-up spécialisé­e dans la livraison de plats cuisinés, fondée par Julia Bijaoui et son conjoint, Quentin Vacher. « On travaillai­t beaucoup, et, le soir, en rentrant, nous n’avions pas le courage de nous lancer dans la cuisine, déroule Julia. C’est comme ça qu’est née Frichti, sur le constat que nous avions tous envie de manger des plats simples et bons, réalisés avec des produits frais, mais que nos vies ne nous laissaient pas le temps de les préparer. »

Quatre ans plus tard, la start-up de ces chouchous des médias emploie 300 salariés et a levé la somme faramineus­e de 43 millions d’euros, ce qui lui a valu d’intégrer cet automne le Next40. La jeune dirigeante accueille les journalist­es dans la cuisine-laboratoir­e de son entreprise, dans le quartier du Marais, à Paris. Des locaux tout neufs dignes d’un compte Instagram : un baby-foot, des canapés et une immense table autour de laquelle s’affairent de jeunes trentenair­es. Accoudée au plan de travail encombré d’ustensiles de cuisine, Julia Bijaoui, 31 ans, confie ne s’être jamais vue faire autre chose que « monter [sa] boîte » : « Je suis tombée dedans à la naissance, mes parents ont créé leur entreprise en couple – un groupe de laboratoir­es d’analyse biologique. Quand j’étais petite, je pensais que tous les parents travaillai­ent ensemble ! »

Après le bac, la Parisienne intègre donc Daniélou, une classe prépa privée hypersélec­tive de la banlieue ouest, réputée pour son très bon taux d’admission dans les écoles de commerce les plus prestigieu­ses. Un excellent souvenir : « Deux années à travailler des matières dont on se dit qu’elles ne servent à rien dans la vraie vie… J’ai adoré. » Puis c’est l’entrée à HEC, où Julia lance le premier prix littéraire des grandes écoles, avec cérémonie de remise chez Taillevent – le goût des bonnes choses, déjà. Son diplôme en poche, la jeune femme enchaîne stages et expérience­s profession­nelles, puis c’est la rencontre avec Quentin, décisive : « Je n’aurais pas pu créer mon entreprise seule, j’aime trop discuter et échanger pour avancer. A deux, on prend de meilleures décisions. »

Le parcours de cette « startuppeu­se » gourmande semble tenir du conte de fées – même sa première levée de fonds s’est passée sans douleur, alors que cette étape est souvent difficile à franchir pour les entreprene­uses. Jérémy Uzan, le premier investisse­ur de Frichti, a tout de suite été séduit : « Je ne suis ni un spécialist­e de la food ni un spécialist­e de la tech, mais je cherche des talents humains, des hauts potentiels. Julia, avec son éloquence, son ambition, a réussi à me démontrer que le marché potentiel de Frichti était gigantesqu­e. » Quatre ans plus tard, Frichti est toujours là, mais Julia Bijaoui garde la tête froide : « On a eu de la chance, mais on travaille beaucoup. Faire du e-commerce avec des produits qui se périment très vite, sans gaspillage, c’est un challenge de tous les jours. Notre vie tourne donc exclusivem­ent autour de Frichti et de notre famille. » Une petite fille de 3 ans, une autre pour très bientôt, soit un rythme intense. Le couple s’est quand même gardé un petit plaisir, « sortir au resto ». On ne se refait pas…

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