Violences sexuelles : les enfants en première ligne
Al’occasion du 30e anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, le secrétaire d’Etat chargé de la Protection de l’enfance, Adrien Taquet, devait annoncer ce mercredi un plan de lutte contre les violences faites aux enfants. Il comprend 22 mesures, dont certaines relatives aux sévices sexuels. Si, depuis deux ans, médias et politiques se saisissent du sujet des violences faites aux femmes, celles faites aux enfants restent encore souvent ignorées. En France, 4 affaires de violences sexuelles sur 10 concernent pourtant des mineurs. « On n’a sans doute pas envie de voir ce qu’il y a de plus abject en nous », explique à L’Express Adrien Taquet. « La société et la justice ignorent les victimes, on est face à un scandale humain et de santé publique », estime Muriel Salmona, psychiatre. Les statistiques lui donnent raison. Selon l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP), seuls 4 % des viols sur mineurs font l’objet de plaintes. Parmi elles, peu de condamnations. « On court souvent après la preuve, c’est parole contre parole », décrypte Marie Mercier, sénatrice, auteure d’un rapport sur le sujet qui évoque « une forme de loterie ». Il faut tomber sur « le bon policier, le bon juge, le bon psychologue ». « Les forces de l’ordre et les magistrats sont de mieux en mieux formés, mais on continue à avoir un problème avec la crédibilité de la parole de l’enfant », reconnaît Adrien Taquet, qui pointe les « effets délétères du procès d’Outreau ». Parmi les mesures prévues, l’amélioration de la qualité du recueil de la parole :
« En moyenne, un enfant doit raconter six fois ce qu’il a vécu, c’est traumatisant. » Des unités d’accueil médico-judiciaires pédiatriques, qui rassemblent en un lieu unique policiers, médecins, juges, devraient être installées dans chaque département. Pour mieux protéger les enfants, l’utilisation du fichier national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes devrait être renforcée. Un numéro d’écoute unique devrait être expérimenté, à destination des personnes conscientes d’avoir une attirance pour les enfants. Le but : « Prévenir le passage à l’acte en leur offrant des soins adaptés », conclut Adrien Taquet, qui plaide pour « une prise de conscience collective ».