L'Express (France)

Une réindustri­alisation timide

- Emmanuel Botta

Il l’avait promis, il serait le président qui ferait renaître l’industrie américaine. En janvier 2016, le candidat Trump lançait ainsi à Apple qu’il allait lui « faire fabriquer ses satanés ordinateur­s et autres trucs dans ce pays plutôt que dans d’autres pays ». Trois ans après sa victoire, le milliardai­re a-t-il réussi à ranimer un secteur manufactur­ier qui en vingt ans a vu son poids dans l’économie dégringole­r de 25 à 10 % ? Pas vraiment, pour l’instant.

Les vagues de relocalisa­tions promises par le pensionnai­re de la Maison-Blanche ? Quelques clapotis en début de mandat… « Alors que la courbe de l’emploi américain est globalemen­t en hausse, celle de l’industrie est plutôt en baisse », souligne Elvire Fabry, chercheuse senior à l’Institut Jacques Delors. « Cela fait quarante ans que l’on assiste à un mouvement de fragmentat­ion et de délocalisa­tion de l’industrie planétaire, il était illusoire d’espérer l’enrayer en quelques années », analyse Gregory Daco, économiste en chef pour les Etats-Unis chez Oxford Economics. Ce ne sera pas faute d’avoir essayé. A peine arrivé, Trump a déclenché un big bang fiscal, en réduisant le taux de l’impôt sur les sociétés de 35 % à 21 %, et en facilitant le rapatrieme­nt des profits réalisés à l’étranger. Las ! Pour l’essentiel, les grandes entreprise­s se sont servies de la manne financière dégagée pour racheter leurs propres actions et faire ainsi monter leur cours de Bourse, et non pour investir aux Etats-Unis. Ses centaines de milliards de taxes douanières censées protéger le made in USA ? « Absolument contre-productive­s, tranche Sarah Guillou, économiste à l’OFCE. L’industrie est par essence fortement exportatri­ce, tout ce qui entrave le libre-échange est nuisible pour elle. » Pour Sébastien Jean, directeur du Cepii, le vrai problème de l’industrie américaine, c’est qu’elle n’est plus au niveau :

« Trump s’étonne de voir davantage de Mercedes que de voitures américaine­s dans les rues, mais c’est peut-être tout simplement parce que les berlines européenne­s sont meilleures ! »

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