LES MISÉRABLES
de Ladj Ly. Avec Damien Bonnard, Alexis Manenti, Djebril Didier Zonga… 1 h 42. 17/20
D’un côté, Stéphane intègre une équipe de la brigade anticriminalité (BAC) à Montfermeil (Seine-Saint-Denis). De l’autre, le lionceau d’un cirque installé aux abords de la cité a disparu. Au milieu, la tension monte entre les Roms, propriétaires du félin, et les bandes du quartier, soupçonnées du vol. La poudrière explose quand un policier, lors d’une intervention, « bave » avec son flash-ball, filmé par un drone. A partir de là, on arrête de chercher le lionceau et on cavale après la vidéo compromettante. C’est haletant. Comme un thriller. Mais c’est intelligent, aussi. Comme un documentaire. Ladj Ly ne cherche pas à épater, mais à sensibiliser, à alerter. La force de ses Misérables, prix du jury au Festival de Cannes, réside dans un regard objectif qui évite de catégoriser les bons et les méchants – à l’exception, bien sûr, du flic bas de plafond et à la gâchette facile, contrebalancé par ses collègues honnêtes et droits. Il y a les gamins innocents, les dealers, les Frères musulmans, le kebab, les tours, le béton… Un décorum propice aux clichés, savamment évités car raconté de l’intérieur par un cinéaste non seulement doué, mais en plus concerné depuis sa naissance. Les Misérables n’est pas un pamphlet mais une invitation à réfléchir, doublée d’un état des lieux alarmant. Le but n’est pas de mettre de l’huile sur le feu, mais de constater les ravages d’un incendie social. Brûlante réussite.
Voir aussi page 88.