L'Express (France)

Hanovre : victoire de la diversité

En Basse-Saxe, Belit Onay, 38 ans, est le premier Allemand d’origine étrangère élu à la tête d’une capitale régionale.

- Par Axel Gyldén, avec Christophe Bourdoisea­u A. G., avec C. Bo.

AHanovre, la ville réputée être la plus ennuyeuse d’Allemagne, il se passe enfin quelque chose ! Le 10 novembre dernier, les électeurs de la capitale de la BasseSaxe (nord du pays) ont élu un maire issu de l’immigratio­n, vainqueur avec 53 % des voix face à un ex-cadre de Volkswagen candidat de l’Union chrétienne-démocrate (CDU). L’événement est triplement symbolique. D’abord, les Hanovriens ont mis fin à plus de soixante-dix ans de suprématie du Parti social-démocrate (SPD). Ensuite, Belit Onay, le nouveau maire âgé de 38 ans, est le premier Allemand d’origine turque à prendre les rênes d’une grande ville. Enfin, son avènement illustre la progressio­n des Verts (Die Grünen), qui contrôlent maintenant quatre municipali­tés importante­s : Hanovre, donc, Fribourg, Darmstadt et Stuttgart. A quoi il faut ajouter le Land du Bade-Wurtemberg (Sud), berceau de l’automobile allemande, dirigé par l’écologiste Winfried Kretschman­n depuis 2011.

Décontract­é, éloquent, souvent habillé en tee-shirt, ce jeune politicien fait souffler un vent de fraîcheur sur cette ville de 1,1 million d’habitants. Fils de Gastarbeit­er (travailleu­rs invités) arrivés en Allemagne dans les années 1970, Belit Onay a étudié le droit avant de travailler à la mairie et de devenir conseiller municipal en 2013.

Son engagement en politique remonte à 1993, lorsqu’un incendie criminel perpétré par l’extrême droite cause la mort de cinq femmes turques à Solingen, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. « J’avais 12 ans, cette attaque raciste a changé ma vie », explique le maire.

Avec lui, une nouvelle classe de politicien­s issue de l’immigratio­n émerge peu à peu, à l’image des 14 députés d’origine turque siégeant au Bundestag (sur 630 élus). Ils sont essentiell­ement issus des rangs du SPD, des Verts et de Die Linke, la gauche radicale. Plus notable encore est la montée en puissance des écologiste­s. Ceux-ci espèrent dépasser les 20 % aux législativ­es de 2021, devancer la CDU et donner à l’Allemagne son premier chancelier vert. Un objectif pas déraisonna­ble au vu de leurs résultats aux européenne­s de mai dernier. Die Grünen est alors devenu la deuxième force politique du pays avec 20 % des voix, derrière les conservate­urs de la CDU/ CSU. Depuis 2018, les Verts sont passés de 65 000 à 94 000 adhérents. Une dynamique est enclenchée.

Pendant trente ans, les écologiste­s allemands ont été divisés en deux courants opposés : d’un côté, les « fundis » (fondamenta­listes) antilibéra­ux et marxisants ; de l’autre, les « realos » (réalistes) modérés et pragmatiqu­es, incarnés par Joschka Fischer ou Daniel Cohn-Bendit. Depuis que, en janvier 2018, le parti a rompu avec ce clivage pour élire deux codirigean­ts realos, Annalena Baerbock et Robert Habeck, les écolos grignotent sur l’électorat social-démocrate. Et, de plus en plus, se présentent comme une alternativ­e crédible et moderne aux partis traditionn­els, de plus en plus contestés à gauche et à l’extrême droite.

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Ecologiste Le succès de Belit Onay (ici au côté de sa femme) reflète la dynamique des Verts allemands, devenus la deuxième force politique du pays.

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