Hymne à la débrouille
Et si l’autobiographie de Luc Besson était un des meilleurs livres de l’année ?
Ce récit est tout aussi fascinant que passionnant de bout en bout. On en sort comme contaminé par son énergie. Car il en fallait de l’énergie au jeune Luc Besson pour survivre dans un milieu si hostile. Trimballé toute son enfance, souvent délaissé par ses parents, qui ont recomposé leurs vies respectives sans lui, il navigue entre rêveries maritimes et désespoir chronique. Il déteste l’école : « Le Rouge et le Noir, ce n’est pas pour moi. Il fallait juste me donner du bleu. » Seule une révélation quasi mystique va le sauver : il est fait pour le cinéma. La chronique de son acharnement est démente. Et c’est assez étrange de lire ces péripéties à l’aune de ce que nous savons : ce jeune homme va finir par créer des films mythiques et un empire.
Pour l’instant, il est prêt à tout : dormir dans un camion pour garder du matériel, rouler sans assurance, faire apparaître de l’eau dans une fontaine desséchée. Il fait tous les boulots. On le retrouve dans des petits rôles chez Yves Robert ou chargé du casting d’un film, pour lequel le réalisateur a besoin de 200 figurants pour le lendemain. Le jeune Luc a une idée : il fonce dans une auberge de jeunesse et fait croire que la vedette du film est Alain Delon ! Tout le monde rapplique, et lui se sauve à la fin de la journée avant qu’on ne découvre la supercherie. Un véritable hymne à la débrouille. Porté par la conviction qu’il faut sans cesse continuer à croire en ce qui nous illumine, Besson parviendra au succès avec Subway et, surtout, Le Grand Bleu. Le réalisateur revient sur la projection presse à Cannes, qui a été une boucherie. Le livre s’arrête sur les 10 millions d’entrées du film. Il a alors 30 ans, et la vie devant lui. Si on attend la suite, on se dit qu’il y aurait vraiment un film à faire de ce roman d’aventures.