On en parle, le tour du monde, l’histoire éco, la personnalité, Plantu…
Il aura fallu trois jours au parquet de Paris pour diligenter une enquête préliminaire après nos révélations sur le scandale du don des corps. Le motif ? L’atteinte à l’intégrité d’un cadavre. Les investigations ont été confiées à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP). Elle devra mener perquisitions et interrogatoires dans cette affaire. Des années durant, les dépouilles de personnes ayant fait don de leur corps à la science ont été conservées dans des conditions indignes, 45, rue des Saints-Pères, dans le VIe arrondissement, à l’université Paris-Descartes. Les photographies prises en novembre 2016 montrent des cadavres démembrés, stockés sans considération dans des chambres froides obsolètes, non hermétiques, laissant passer les rongeurs. Frédérique Vidal, la ministre de l’Enseignement supérieur, a annoncé la fermeture administrative temporaire du centre. Politiquement, il y a urgence : l’un de ses conseillers, Frédéric Dardel, était président de ParisDescartes de 2011 à 2019. C’est à lui que sont présentées, fin 2016, les photos insoutenables décrites dans notre article. Depuis, des petits travaux de rénovation ont été réalisés… en attendant le grand chantier qui devrait débuter en 2020. De son côté, l’université parisienne a présenté ses excuses aux familles et mis en place une ligne téléphonique dédiée. « Mais, au bout du fil, on trouve une psychologue qui ne sait pas répondre à nos questions, s’insurge le fils d’un donneur. On nous demande les références sous lesquelles notre père a été enregistré, comme s’il était toujours de la marchandise ! » Les familles se regroupent pour intenter une action collective. Elles devraient se porter partie civile. Le conseil de l’ordre des médecins a été saisi. L’Union française pour une médecine libre (UFML) vise notamment le Pr Guy Vallancien, directeur du centre de 2004 à 2014, et réclame « d’éventuelles poursuites ordinales ». Le syndicat dénonce « des comportements à l’opposé de ce que doit être l’engagement médical », contrevenant au code de déontologie des médecins. L’enquête judiciaire devra répondre à la question centrale : comment une telle situation a-t-elle pu perdurer si longtemps ? Un ancien du centre résume : « Pendant des années, les gens ont vécu et accepté une situation immonde par la légitimation de l’habitude. »