Benjamin Raigneau, un DRH « de gauche » sur des charbons ardents
Il a 35 ans et se retrouve un peu malgré lui en première ligne pour mener une transformation sociale comme la SNCF n’en a jamais connu. Passage d’une entreprise publique à une société anonyme, disparition du statut de cheminot, écriture et négociation d’un nouveau pacte social… Ces derniers mois, Benjamin Raigneau dort peu et enchaîne les réunions avec les syndicats mais aussi avec le gouvernement. Car, cerise sur le gâteau, la réforme des retraites Macron vient lui compliquer la donne. Certes, le jeune DRH a fait ses armes lors de la grève perlée de 2018, mais le mouvement actuel promet d’être d’un niveau bien supérieur. « Benjamin est armé pour y faire face, c’est un garçon brillantissime », assure, confiant, son mentor, Gilles Gateau, ancien DRH d’Air France et ex-directeur de cabinet de Manuel Valls à Matignon. C’est auprès de ce vieux soutier du social, dont il a été le bras droit, que Benjamin Raigneau a appris les subtilités du dialogue social, d’abord au ministère du Travail, avec Michel Sapin, puis à Matignon, sous le quinquennat Hollande. Sans compter aussi l’enseignement de son autre maître à penser, Jean-Denis Combrexelle, qui l’a vu arriver à la direction générale du travail, la DGT, après sa sortie de l’ENA. « Il est arrivé par choix dans cette administration réputée difficile », se souvient le haut fonctionnaire, aujourd’hui président de la section du contentieux au Conseil d’Etat. A l’époque, Benjamin Raigneau succède dans ce bureau de la DGT, sur les bords de la Seine, à Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande et actuel candidat à la mairie de Paris… Si Benjamin Raigneau est plus discret et n’envisage pas une carrière politique, il partage avec son prédécesseur des affinités à gauche, qu’il cultive toujours. « C’est une vraie chance d’avoir des jeunes comme lui, avec un idéal social suffisamment fort pour s’engager sur des sujets sensibles d’intérêt général comme la SNCF. Il pourrait gagner deux à trois fois plus en travaillant dans le privé à Singapour ou à Londres », souligne encore Jean-Denis Combrexelle. Volontariste, cultivant le franc-parler, réputé méthodique… il semble cocher toutes les cases pour déminer la situation. « Tout le monde vante ses qualités techniques, elles sont réelles… mais pour le sens politique, on a plus de doutes… », plaide un syndicaliste. La marche n’est-elle pas un peu haute? Benjamin Raigneau avait la confiance aveugle de Guillaume Pepy. Qu’en sera-t-il avec Jean-Pierre Farandou, qui vient d’arriver à la SNCF ?