Rififi autour du statut professionnel de l’écrivain
PAR MARIANNE PAYOT Le rapport Racine sur « L’auteur et l’acte de création » provoque la discorde dans le milieu littéraire.
Ce n’est pas un roman, mais un rapport qui déchaîne depuis plusieurs semaines les passions dans le monde de l’édition ; un rapport de 141 pages, réalisé par Bruno Racine, l’ancien patron de la BnF. 141 pages, donc, et 23 recommandations pour améliorer les conditions de vie dégradées des artistes auteurs. Si nombre de ces propositions (simplification des régimes sociaux, aides de l’Etat, transparence sur l’exploitation des oeuvres, etc.) ne suscitent pas de polémiques, deux ont mis le feu aux poudres : une rémunération plus juste des auteurs avec un taux minimal de 10 % d’à-valoir, et la reconnaissance sonnante et trébuchante du travail en amont de l’oeuvre, sous la forme d’un « contrat de commande ». Alors que le Syndicat national des éditeurs rappelait prudemment qu’il était essentiel de prendre en compte l’ensemble d’une filière fragile, Antoine Gallimard, lui, est monté au créneau le 7 février dans Le Monde, fustigeant un rapport « hors sol » et méprisant. Puis ce fut au tour d’un collectif d’auteurs de revendiquer, dans ce même quotidien, un statut professionnel, et d’en appeler à l’intervention de l’Etat pour la mise en oeuvre desdites recommandations. Le 18, douche froide, le ministre de la Culture Franck Riester renvoie pour expertise les points épineux. Depuis lors, les éditeurs, soucieux de ne pas se retrancher dans une défense corporatiste, restent muets. Il est vrai que les situations diffèrent selon les secteurs – essais, fictions, BD, jeunesse… Comment quantifier la gestation d’un roman ? Et donner 10 % d’à-valoir à l’auteur d’un – coûteux – beau livre ? « Ce qui est pertinent se négociera à terme, et ce qui est absurde tombera », pronostique, optimiste, un éditeur.