L'Express (France)

Un Rustique fort en toque

La nouvelle coqueluche de Lyon s’appelle Maxime Laurenson. Un chef qui signe une cuisine de haute volée et mise sur la gourmandis­e. PAR EZÉCHIEL ZÉRAH

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On devrait mesurer les cuisiniers à l’aune d’une madeleine – caramélisé­e sur les bords, lentement fondante avec un goût de noisette. Celle de Maxime Laurenson trusterait sans doute les premières places. Le jeune trentenair­e enjoué a fui l’agitation parisienne pour ouvrir en novembre son propre établissem­ent dans un quartier résidentie­l de la capitale des Gaules, après avoir ciselé de hauts couplets pour d’autres (Jean Sulpice, chef doublement étoilé, à Val-Thorens ; le groupe Bernard Loiseau, au sein duquel il a décroché un astre Michelin en 2018). La petite maison aux murs blancs piqués de plantes et aux pans tantôt bois tantôt pierre sent le neuf, mais le fil des jours viendra patiner les lieux.

En général, à cet âge, on laisse derrière soi l’artillerie très gastronomi­que pour une partition plus pop. Maxime Laurenson a préféré rester dans le circuit de la F1 de la fourchette dans sa région natale : 25 places assises, un unique service le soir, et en semaine seulement. La clientèle lyonnaise, pas la moins exigeante, se presse déjà chez le garçon. Le dîner est donné, 56 euros à peine. Derrière les fourneaux, ça dépote dès la première séquence (il y en a huit ou dix). Sous une écume de lentilles se cache une vivace salade de lentilles vertes du Puy et carottes. Une sorte de petit salé… sans cochon, mais c’est tout comme, avec l’esprit fumé du plat. Dans sa coquille vient l’oeuf, dont le gras est fouetté par la neige de fromage de chèvre et cumin des prés sur le dessus. On poursuit avec un plaisir régressif : tremper de petites cuisses de grenouille­s dans une nage herbacée. Suprême de pigeon soyeux et son épais jus à la violette accompagné de pommes dauphines d’anthologie, omble chevalier rosé humidifié par une sauce pistache, citronnell­e et verveine subtile. Derrière les intitulés simples, il y a une précision et une finesse féroces que l’on retrouve dans l’esthétique biscuit de brochet et anguille surmonté d’un rail d’oeufs de brochet pour froisser la rondeur. Capable de ce genre de grand morceau, Maxime Laurenson est promis à une destinée merveilleu­se s’il parvient à s’émanciper de son cap parfois trop chaleureux. Spoiler : chaque convive repart avec une petite boîte rectangula­ire qui abrite une douceur. Je vous laisse deviner laquelle.

RUSTIQUE

14, RUE D’ENGHIEN, LYON (IIe). DU LUNDI AU VENDREDI, DE 19 H 30 À 21 H 45. MENUS : 56 ET 68 €. TÉL. : 04-72-13-80-81.

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 ??  ?? OEuf, fromage de chèvre et cumin des prés.
OEuf, fromage de chèvre et cumin des prés.
 ??  ?? Biscuit de brochet et anguille, surmonté d’oeufs de brochet.
Biscuit de brochet et anguille, surmonté d’oeufs de brochet.

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