LE RÉPONDEUR
D. P.
PAR LUC BLANVILLAIN. QUIDAM, 260 P., 20 €.
Décidément, la figure de l’écrivain inspire plus que jamais… les écrivains ! Même si ce deuxième roman « adulte » de Luc Blanvillain, qui a beaucoup écrit pour la jeunesse, donne avant tout la vedette à un personnage autrement plus original : Baptiste, 27 ans, natif d’Angoulême, imitateur professionnel très doué qui n’a pas son pareil pour restituer certaines voix oubliées – Gide, Céline, Mendès France, Sartre, Paul Valéry, Léon Zitrone, Simone Veil, etc. Un métier peu rentable dans le théâtre associatif parisien où il se produit, au public clairsemé. Jusqu’au jour où le romancier à succès Pierre Chozène, aussi réputé que discret, lui fait une singulière proposition : répondre à sa place au téléphone, se faire passer pour lui auprès de ceux qui le sollicitent quotidiennement – sa fille, son éditeur, son ex-femme, son attachée de presse, son traducteur coréen, etc. – afin qu’il puisse écrire en paix un nouveau livre. Le jeune homme accepte, moyennant « un salaire faramineux » et avec l’aide de la « bible » que lui confie Chozène, pour tout savoir de sa vie. Ce jeu de rôle n’ira pas sans risques…
Si Le Répondeur multiplie rebondissements et quiproquos, cette brillante comédie de moeurs penche moins du côté de la farce que d’une satire drôle, subtile aussi, nourrie de dialogues épatants. Luc Blanvillain excelle à mener une réflexion profonde sur la création littéraire et artistique à l’ère de la tyrannie des smartphones et du tout médiatique, pointant « l’inlassable puissance pérorante du rhizome numérique, l’imagination des commentateurs et l’énergie des trolls ». La belle écriture de cet agrégé de lettres offre une parenthèse bienvenue.