Le plan des assureurs pour l’après-crise
Pour mieux indemniser les entreprises lors de prochaines catastrophes sanitaires, un « régime pandémie » inédit pourrait être mis en place.
Marc ne décolère pas. Plus d’un mois après la fermeture de son magasin, il est toujours sans nouvelles de son assureur. Rien, ou presque… Juste un mail lui expliquant brièvement qu’il en sera de sa poche pour les pertes de son entreprise. « Je ne comprends pas », s’énerve le quadra parisien joint par téléphone. Francis est logé à la même enseigne. Installé du côté de Rennes, ce jeune artisan a dû lui aussi se résigner à fermer son atelier à cause du confinement, à la mi-mars. Depuis, ses revenus ont disparu. Son assureur ? « Il ne peut rien couvrir », explique-t-il. Contactée par L’Express, la compagnie confirme que rien n’est envisageable. « Je ne sais pas comment je vais faire », se désole l’entrepreneur.
Marc et Francis ne sont pas des cas isolés. Ils sont des dizaines de milliers en France à subir les mêmes déboires. Et leur nombre ne fait que progresser. Avec les risques de faillite qui vont de pair. L’histoire est chaque fois identique : l’assureur ne couvre pas la « perte d’exploitation », c’està-dire le manque à gagner du magasin, de l’atelier… Selon la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface), les faillites pourraient s’envoler de 25 % en 2020. Une flambée plus sévère qu’après la crise de 2009.
Comment expliquer une telle situation ? Les choses sont en réalité assez simples : si les assureurs ne prennent pas en charge les dommages de leurs clients, ce n’est pas faute de clauses dans les contrats – certains en ont pour les pandémies –, mais parce que la décision du gouvernement de fermer les entreprises est une décision administrative et générale. « Elle n’a rien de sanitaire », martèle Florence Lustman, présidente de la Fédération française de l’assurance. Ce qui change beaucoup de choses. « Il y a eu un gros malentendu sur l’indemnisation des pertes d’exploitation », précise Jean-Laurent Granier, PDG de Generali France. « La pandémie de Covid19 n’empêche pas les entreprises de fonctionner, c’est l’Etat qui les en empêche ! » insiste le dirigeant. Or, dans ce cas, « aucune garantie n’est prévue », souligne Renaud Guidée, directeur des risques chez Axa. Autrement dit : que le gouvernement assume ses responsabilités !
Un message reçu 5 sur 5. Depuis le début du confinement, le gouvernement a mis en place plusieurs dispositifs pour aider les indépendants. Au premier rang desquels un « fonds de solidarité » réservé aux TPE et PME. Seule condition : avoir perdu au moins 50 % de ses revenus en avril (70 % en mars) par rapport au chiffre d’affaires encaissé à la même période, un an plus tôt. Financée sur les deniers publics, l’enveloppe de 7 milliards d’euros permet de toucher jusqu’à 5 000 euros par entreprise. Auxquels s’ajoutent 1 500 euros via la prime pour les indépendants. De quoi les faire tenir ? « Mes pertes s’élèvent déjà à plus de 50 000 euros », balaie Marc, qui s’est néanmoins adressé au fonds. Conscients du problème et critiqués de toutes parts, les assureurs ont décidé de bouger. « Il a fallu un peu les pousser », euphémise un bon connaisseur du secteur. Depuis la fin mars, ils sont en tout cas présents et participent, eux aussi, au fonds de solidarité. Axa, Generali et les autres géants du marché y ont progressivement injecté 200 millions d’euros, puis encore 200 millions. Sans compter les aides extracontractuelles avec le maintien des assurances, alors que les entreprises ne paient plus leur cotisation. Au total, le secteur « a mobilisé 1,75 milliard d’euros, indique Florence Lustman. Un effort inédit. »
Et maintenant ? Car s’il faut aider et sauver les entreprises, l’important est aussi de préparer « l’après-crise ». C’est-àdire concevoir un dispositif qui permettra d’éviter qu’une telle débâcle économique ne se reproduise. Les assureurs ont déjà commencé à travailler. « Nous réfléchissons à un nouveau système », confirme Florence Lustman. A Bercy, un groupe d’étude planche également sur le sujet, en « étroite collaboration » avec les assureurs. L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit ni plus ni moins que de créer un nouveau risque : celui des pandémies. « Partout où il y a un risque et un besoin de protection, il faut apporter une réponse. En 2003, après la crise du Sras, les entreprises asiatiques ont demandé à être couvertes contre ce risque », explique Renaud Guidée. Désormais, la France et une grande partie de la planète font de même.
Reste qu’un tel système pose des questions. Dans un premier temps, il s’agira de définir quels événements seront considérés comme des « pandémies ». Car s’il ne fait aucun doute que le Covid-19 en est une, d’autres événements – une grosse grippe, par exemple – peuvent se trouver dans une zone grise. « Il faudra fixer des critères », estime Thierry Martel, directeur général de Groupama Assurances Mutuelles. Il faudra ensuite déterminer quels types de préjudices pourraient être indemnisés. La perte d’exploitation ? La simple perte de bénéfices ? « Tout est sur la table », selon les assureurs. De même, la taille des entreprises qui pourraient être prises en charge devra être précisée. Petites, moyennes, grandes ? L’indemnisation d’un groupe du CAC 40 comme Accor, dont 80 % de l’activité est à l’arrêt, ne serait pas sans
« La pandémie n’empêche pas les sociétés de fonctionner. C’est l’Etat qui les en empêche »
conséquence pour la solidité financière du secteur.
Subsiste enfin la question du montant des indemnisations et de leur financement. « C’est l’élément essentiel de l’équation », précise-t-on du côté de Bercy. Une chose est sûre : le futur système coûtera très cher. Les entreprises et les particuliers seront-ils prêts à payer ? Au bout d’un mois, la facture du Covid-19 dépasse déjà 60 milliards d’euros, soit plus qu’un siècle de cotisations payées au titre des pertes d’exploitation pour les incendies et dommages matériels. Et personne ne sait quand l’économie redémarrera. Sur cette base, les assureurs, dont les fonds propres représentent environ 50 milliards d’euros, tablent sur un dispositif qui pourrait monter à « quelques milliards d’euros » à leur charge. Mais pas plus. « Le futur mécanisme nécessitera l’intervention de l’Etat, puisque lui seul a les reins assez solides pour encaisser un choc comme cette pandémie », souligne Thierry Martel. D’où l’idée de s’inspirer du régime des catastrophes naturelles. Un système créé dans les années 1980, qui présente l’avantage d’être en grande partie financé et assuré par… l’Etat. Rien n’est arrêté, indiquet-on à Bercy. Mais c’est le scénario le plus sérieusement étudié. « Nous devons imaginer un régime de catastrophe sanitaire. Il s’agira forcément d’un partenariat publicprivé. Il faut deux niveaux », insiste JeanLaurent Granier. Un avec les assureurs, et un second avec l’Etat, quand les primes seront épuisées. Les assureurs et Bercy feront leurs propositions vers le mois de juillet. D’ici là, le confinement devrait avoir cessé. Mais cela non plus les assureurs ne peuvent le garantir.
maintien de la programmation pluriannuelle de l’énergie, les tarifs de rachat d’électricité verte ont été garantis pour trois mois, et une partie des appels d’offres reportés en novembre pour que la filière s’organise. Des mesures saluées par le secteur.
Largement subventionné, celuici est loin d’être représentatif de la situation de la filière dans le reste du monde. Selon BloombergNEF, pour la première fois depuis 1980, le nombre de nouvelles installations solaires devrait baisser en 2020. Idem pour l’éolien. Le cabinet Rystad Energy anticipe, lui, un ralentissement en 2021, avec une baisse de 10 % des projets. Le plongeon du prix du pétrole, qui le rend plus compétitif face au renouvelable, pourrait également freiner le développement de ce dernier.
Un obstacle tout sauf anecdotique sur la trajectoire des accords de Paris. Comme le soulignait l’Agence internationale pour les énergies renouvelables début janvier, il faudrait multiplier par plus de 2 l’investissement dans les énergies vertes (à 740 milliards de dollars par an, contre 330 actuellement) pour atteindre les objectifs climatiques.