Le laitier anglais revient en grâce
Soyons clairs : la patrie de Sa Majesté n’a jamais vraiment abandonné la figure iconique et attachante de son laitier. Pour preuve, un milkman of the year était désigné en 2018 en la personne de Ian Beardwell, costaud à casquette qui livre, outre le lait, une centaine de produits sélectionnés par son employeur, Milk & More, avant 7 heures du matin. Mais, malgré le souffle apporté par une génération de foodies séduits par l’attrait écologique de la chose (lait bio, bouteilles en verre réutilisées 25 fois, livraison par véhicules électriques), le métier n’est plus ce qu’il était : en 1980, 89 % du lait consommé était livré à domicile, contre moins de 3 % en 2015, selon un article du site Alimentation générale. Or voilà que le coronavirus remet le bon vieux laitier sur le devant de la scène.
Milk & More, le plus important acteur du marché, recherche 100 personnes pour faire face aux 25 000 nouveaux clients de ces dernières semaines, rapporte Sky News. Le New York Times aussi se fait l’écho de ce phénomène, et de plus petits acteurs comme I.W. Critchley & Son, qui livre son lait frais du Lancashire six jours sur sept, se voient récompensés de messages et de dessins d’enfants reconnaissants. A la lecture de The British Milkman (de Tom Phelps, éd. Shire Library, 2010), on replonge avec nostalgie dans cet univers désuet. Les seaux à l’ancienne, les képis aux airs militaires et les tabliers à larges rayures de l’entre-deux-guerres, la respectabilité de ces hommes laborieux, dont fit partie le célèbre acteur comique Benny Hill à ses débuts, les chevaux tirant les voitures jusqu’à la toute fin des années 1950, leur courage lors du diabolique hiver de 1963, le permis pour camionnette électrique qui dispensait du permis traditionnel… Du petit-lait.