Le monde de l’édition contraint à devenir vertueux
PAR MARIANNE PAYOT Coronavirus oblige, les éditeurs diminuent le nombre de leurs publications. Mais pour combien de temps ?
C’est un serpent de mer bien français. Sporadiquement, on crie à la surproduction dans un pays où sont publiés, bon an mal an, plus de 100 000 titres – dont quelque 45 000 nouveautés –, qui ne tirent pas tous leur épingle du jeu, loin de là. Il aura fallu un virus pour que l’on diminue la voilure. Jour après jour, les annonces fusent : moins 60 % de publications du printemps chez Stock, moins 70 % aux Arènes et chez Albin Michel, moins 80 % chez Grasset… Alors qu’on s’attendait à un engorgement des librairies lors de leur réouverture, plus de 5 000 nouveautés ayant été bloquées durant le confinement, nous nous acheminons vers un marché du livre raisonnable et cela, pendant toute l’année – entre 20 % et 40 % des titres pourraient ne pas sortir en 2020.
« Les libraires nous ont forcé la main, et ils ont eu raison, explique Olivier Nora, PDG de Grasset. Beaucoup d’entre eux sont en faillite virtuelle, et il nous faut aussi penser à nos auteurs publiés avant le 19 mars, qui doivent bénéficier d’une seconde chance. » Sans parler de vagues éventuelles à venir, susceptibles d’enrayer de nouveau la chaîne du livre. Voilà pour 2020. Mais ces attitudes vertueuses seront-elles pérennes ? Olivier Nora, Karina Hocine, de Gallimard, Muriel Beyer, des éditions de l’Observatoire, pensent que « le monde d’après ressemblera au monde d’avant », tandis que d’autres, comme Gilles Haéri, directeur général d’Albin Michel, estiment que cette crise va accentuer la prise de conscience qui préexistait avant le Covid-19. A suivre, donc. Dans un prochain livre ?