Faut-il effacer les dettes publiques liées au Covid-19 ?
Pour contrer les effets de la récession, les Etats ont ouvert grand les vannes de la dépense, entraînant une envolée de leur dette. Le débat monte sur la possibilité de l’annuler et permettre ainsi un rebond plus rapide et durable.
OUI / LES RISQUES D’UNE TELLE STRATÉGIE SONT MINEURS PAR RAPPORT AUX GAINS
Au sortir de la crise, les dettes publiques vont partout, et notamment en Europe, exploser, atteignant des niveaux historiques en temps de paix. Annuler le supplément d’endettement qui va émerger de la gestion de la pandémie est totalement légitime. Il ne s’agit pas ici d’aider des acteurs ou pays fautifs dans le déclenchement de la crise, comme on a pu le dire lors des plans d’aide en 2008, « au profit » des banques. Le Covid-19 est un choc totalement exogène, et on ne peut en imputer la responsabilité à quiconque.
En revanche, cet effacement ne doit concerner que les obligations qui sont entre les mains de la Banque centrale européenne (BCE). Rappelons que l’institution de Francfort détient 27 % de la dette publique de l’Union. En effacer une partie s’effectuerait sans dommages économiques majeurs, à la différence d’une annulation des titres de dette détenus par les épargnants privés, qui reviendrait à leur spoliation. Dans le cas de la BCE, l’opération est possible : c’est le seul agent économique qui puisse émettre de la monnaie pour effacer la dette. On en finirait au moins provisoirement et partiellement avec les discours punitifs sur la dette. Surtout, les risques d’une telle stratégie sont mineurs par rapport aux gains. L’inflation ? Les dix dernières années ont connu l’un des niveaux les plus faibles depuis l’après-guerre malgré l’explosion des bilans des banques centrales. L’affaiblissement de l’euro ? Les autres institutions monétaires vont probablement envisager cette solution. Une contrainte de recapitalisation pour la BCE ? Une situation de fonds propres nets négatifs peut être permanente pour une banque centrale, dans la mesure où elle n’a aucune contrainte de liquidité.
Au-delà, il est illusoire de penser que le vieillissement démographique, les défaillances des systèmes éducatif et de santé et les chocs de natures climatique, numérique et migratoire pourront se résoudre uniquement via des ajustements structurels. Dans des pays où la croissance potentielle est faible et où la pression fiscale est élevée, il faut une nouvelle impulsion, à la fois budgétaire et monétaire, condition nécessaire à un renouveau européen. ✷