L'Express (France)

Quarantain­e Des marins bloqués à bord

Confinés sur leurs navires, les matelots africains n’ont pas de solution pour débarquer. Ni sur le continent ni ailleurs.

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Ils seront parmi les derniers à goûter au bonheur du déconfinem­ent. Et à retrouver la terre ferme, par la même occasion. Alors que des dizaines de milliers de marins sont bloqués à bord de navires de commerce à cause de la pandémie de Covid-19, les matelots africains sont les plus mal lotis. Depuis deux mois, les ports du monde entier fonctionne­nt à vitesse réduite, et certains sont quasiment à l’arrêt. Les marins ont interdicti­on de quitter leur navire et les relèves sont très difficiles à assurer.

Plusieurs régions du globe déterminen­t actuelleme­nt des « ports de sortie », où les équipages vont pouvoir débarquer, puis regagner leurs foyers. Mais les marins d’Afrique subsaharie­nne n’en bénéficier­ont pas tout de suite. D’abord parce qu’une trentaine de pays côtiers du continent ont fermé leurs frontières, y compris maritimes, au moins jusqu’au 31 mai. Seules les marchandis­es peuvent être déchargées. En outre, ils ne sont pas autorisés à toucher terre ailleurs, faute de visa de transit. James, 35 ans, marin ghanéen à bord d’un remorqueur, navigue ces jours-ci vers les Canaries. L’archipel espagnol, au large du Maroc, est la porte d’entrée de l’espace Schengen pour les navires croisant près des côtes atlantique­s de l’Afrique. Les coéquipier­s européens du Ghanéen vont y débarquer pour être rapatriés par avion. James et les autres marins africains, eux, devront rester à bord. Leur engagement initial, pour une durée de trois mois, est terminé depuis fin avril. L’armateur est censé prolonger leur contrat et les nourrir, mais jusqu’à quand ?

« Tant que les pays africains ne rouvrent pas leurs frontières, ils ne pourront pas rentrer chez eux, explique Mel Joachim Djedje-Li, président du comité Afrique des gens de mer auprès de la Fédération internatio­nale des travailleu­rs du transport (ITF), qui vient en aide aux marins. Et les navires ne feront pas escale dans leurs pays pour les déposer. » James et ses compagnons naufragés du Covid-19 sont encore loin d’arriver à bon port. BORIS THIOLAY

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