L'Express (France)

Les financiers du Golfe à l’affût

- RAPHAËL BLOCH

Les fonds souverains des monarchies pétrolière­s profitent de la crise pour investir dans les fleurons européens.

Si la crise du Covid-19 est planétaire, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Alors que la plupart des entreprise­s de la planète connaissen­t de grandes difficulté­s, certaines étant même proches de la faillite, d’autres acteurs se frottent les mains : les fonds souverains du Golfe.

Peu connus du grand public, ces mastodonte­s pilotés par les monarchies pétrolière­s gèrent plusieurs centaines de milliards de dollars d’actifs. Et ils comptent bien profiter de la chute des marchés boursiers, qui ont perdu plus de 20 % en quelques semaines. Certaines sociétés, notamment en Europe et aux Etats-Unis, ont même vu leur valeur dégringole­r de 50 %, voire 60 %, devenant des proies faciles. Le Fonds public d’investisse­ment saoudien (PIF) n’a d’ailleurs pas mis longtemps à sortir du bois.

Fort de ses liquidités, le bras financier de Riyad (320 milliards de dollars d’actifs) a continué à prendre des participat­ions dans les géants pétroliers : Shell, Repsol, Total… Avec la forte baisse du prix de l’or noir, qui est même passé en territoire

négatif en avril, les « majors » du secteur sont des cibles de choix. Et des actifs très intéressan­ts pour l’Arabie saoudite, qui cherche à se renforcer dans un secteur de plus en plus tourné vers le renouvelab­le.

Dans un souci de diversific­ation, le PIF a également investi dans le tourisme et le sport. Il a pris un ticket dans le plus gros croisiéris­te de la planète, Carnival, au bord de la faillite à cause de la crise, et mis la main sur le célèbre club de football de Newcastle. Sur sa lancée, le fonds, qui aurait des visées sur l’Olympique de Marseille, a bouclé il y a quelques jours une prise de participat­ion dans le géant mondial du concert Live Nation. Montant de l’investisse­ment : 500 millions de dollars.

Lui aussi à l’affût, le fonds qatarien (330 milliards de dollars d’actifs) n’est pas encore passé à l’action. Très présente en Europe, la Qatar Investment Authority (QIA), notamment propriétai­re du PSG ou des magasins Harrods, s’est récemment dite intéressée par de potentiels investisse­ments dans les technologi­es et la santé. Des secteurs également dans le viseur des Emirats arabes unis, qui, avec leurs différents fonds, gèrent plus de 800 milliards de dollars d’actifs…

Conscients du problème que ces investisse­ments peuvent représente­r, surtout en matière de souveraine­té, les Etats réagissent. En France, un fonds d’investisse­ment baptisé « Lac d’argent » et piloté par Bpifrance, est dans les tuyaux. Annoncé avant la crise, il doit permettre à Paris de « défendre » ses fleurons. Problème, il est abondé en partie par… les Emirats arabes unis. Et ne dispose que de 10 milliards d’euros. Soit plus de 30 fois moins que la plupart des fonds souverains…

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