NON / UNE TELLE MESURE EMPÊCHERAIT LES ENTREPRISES DE S’AJUSTER AU CONTEXTE
Il est quelque peu ironique de poser cette question en France, où les procédures de licenciement sont déjà fortement encadrées et parmi les plus contraignantes de la planète. On le sait, la crise économique que nous traversons laissera peu de choix à certaines entreprises. Bon nombre vont être contraintes d’alléger leurs effectifs pour tenter de sauver leur trésorerie et le reste des équipes.
Pour l’instant, les dégâts sur le marché du travail sont invisibles dans les statistiques, le chômage a même diminué au premier trimestre par effet comptable. Le recours massif à l’activité et au chômage partiels, pris en charge par l’Etat, dissimule encore les effets du confinement sur l’emploi. Copie du Kurzarbeit allemand, testé avec succès pendant la récession de 2009, ce dispositif est bienvenu face à un choc brutal, mais temporaire par nature. C’est une fois celui-ci levé que nous constaterons les dégâts réels sur le marché du travail et sur l’emploi.
Vouloir durcir les conditions de licenciement dans ce contexte, c’est empêcher les entreprises de s’y ajuster. Cela relève d’un choix, celui de faire peser sur les épaules des entreprises, et d’elles seules, le poids de la crise… Le risque est en réalité d’aggraver le problème, en les condamnant à subir le choc, plutôt que de préparer le rebond économique. Il serait préférable de laisser ce rôle d’amortisseur à la Sécurité sociale, dont la logique assurantielle est justement prévue pour jouer le rôle de stabilisateur automatique en période de crise. La France dispose d’ailleurs d’une des assurances-chômage les plus favorables au monde.
Une crise est aussi un moment d’opportunité. Figer le marché du travail pourrait compliquer les reconversions et la recomposition, nécessaire, du tissu productif. Vouloir durcir les conditions de licenciement, c’est en réalité confondre cause et effet de la crise. La cause est une pandémie provoquant une contraction économique violente. L’effet est une vague probable de licenciements dans les secteurs les plus fragiles. Et on ne combat jamais un problème en cherchant à camoufler ses effets.