Malgré la crise, l’uranium irradie
Alors que la demande est restée stable, l’arrêt des sites de production pour cause de pandémie a fait exploser les prix.
Sur les écrans de contrôle du New York Mercantile Exchange (ou Nymex), Bourse d’échange spécialisée dans l’énergie et les métaux, c’est de loin la seule matière première dans le vert depuis le début de l’année.
A la différence du pétrole, de l’électricité ou encore du gaz naturel, l’uranium n’a pas vu ses prix s’effondrer avec le Covid-19, bien au contraire.
Depuis le début du mois de mars, le métal radioactif est passé de 24 à 34 dollars la livre au prix spot, soit une augmentation de 40 % en quelques semaines. Un rebond soudain et spectaculaire pour cette matière utilisée comme combustible des réacteurs nucléaires, dont les prix ne cessaient pourtant de s’éroder depuis la catastrophe de Fukushima en 2011.
L’explication ? Alors que la demande d’électricité nucléaire n’a finalement été que peu impactée par le Covid-19, les rares sites d’extraction du minerai à travers le monde ont, eux, été touchés de plein fouet par les mesures de confinement et la nécessaire protection des salariés.
Exploitant du plus gros site mondial, situé à Cigar Lake, au Canada, l’entreprise Cameco a été l’une des premières à dégainer fin mars, annonçant la fermeture de sa mine pour une durée indéterminée. La filiale canadienne d’Orano (ex-Areva) lui a emboîté le pas, bouclant le site de McClean Lake dans la foulée. D’inquiétante, la situation est carrément devenue critique une semaine plus tard, quand Kazatomprom, compagnie d’Etat kazakhe et premier producteur au monde, a annoncé à son tour le ralentissement de ses activités.
La banque d’investissement américaine Cantor Fitzgerald, qui a compilé les annonces des producteurs, estime que ce sont plus de 46 millions de livres d’uranium qui ont été retirées du marché pendant la crise. Kazatomprom enfonce le clou, et juge que la production pourrait reculer de 10 % en 2020.
Face à une demande qui reste stable, certains analystes estiment que la livre d’uranium pourrait dépasser le cap des 40 dollars dans les prochaines semaines. Du jamais-vu depuis 2013. Et une bonne nouvelle pour les producteurs, même si cette flambée inattendue ne leur permettra d’éponger qu’en partie les pertes liées à l’effondrement de l’activité.