L'Express (France)

Etgar Keret, Giancarlo De Cataldo, Valérie Clo

- DELPHINE PERAS

Parmi les livres parus en pleine crise sanitaire, rédigés bien avant mais qui se révèlent d’une saisissant­e actualité, celui-ci interpelle dès la dédicace : « A nos aînés, aux soignants des Ehpad, à ceux qui avec coeur oeuvrent dans l’ombre. » Nul pathos cependant dans ce septième roman de Valérie Clo (Plein soleil, Les Gosses, La Tyrannie des apparences, etc.) en forme de journal intime. Mathilde, 83 ans, y consigne la dernière année de sa vie, passée dans une maison de retraite sur l’insistance de sa fille. C’est « la Rolls-Royce des Ehpad », certes, rien à redire question propreté et hygiène. Mais la vieille dame, veuve, ancienne journalist­e, est un peu prise au dépourvu par cet univers où il lui faut cohabiter avec de « sacrés énergumène­s », dont l’exubérante Chantal, qui perd la tête et se croit dans un hôtel 4 étoiles de la Côte d’Azur.

Surtout, le temps long de la solitude laisse libre cours aux souvenirs, à commencer par les plus douloureux : une enfance pendant la guerre, cachée avec sa grande soeur chez des paysans du Midi, tandis que ses parents, juifs, mourront au camp d’Auschwitz II-Birkenau durant l’hiver 1943. Les cauchemars resurgisse­nt. Les moments heureux, aussi, de la rencontre avec son futur mari, également journalist­e, à la naissance de leurs deux enfants. Et puis il y a cette aide-soignante « un peu spéciale », Maryline, un rayon de soleil en vérité. Ce récit posthume de Mathilde, au style très simple (presque trop), a le mérite d’aborder le grand âge et la fin de vie avec un franc-parler salutaire. Entre scènes cocasses et considérat­ions graves, tendresse et nostalgie, la romancière – art-thérapeute, par ailleurs, auprès de malades atteints d’Alzheimer – ne se départ jamais d’une grande sensibilit­é.

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