L'Express (France)

Dans les rouages de la Fondation Bill et Melinda Gates

- Des investisse­ments très diversifié­s

Prodiguant 5 milliards de subvention­s chaque année, l’organisme de bienfaisan­ce le plus puissant de la planète est un acteur incontourn­able de l’aide au développem­ent.

L’histoire fait presque partie de la légende. Lors d’un safari en Afrique, à l’automne 1993, Bill et Melinda, tout juste fiancés, croisent un groupe de femmes qui marchent depuis des heures pour rejoindre un point d’eau, portant leurs bébés dodelinant de la tête, assoiffés, dénutris. C’est là que Bill Gates décide qu’un jour, il sauvera la planète. Le tycoon de la Tech n’est pas le premier milliardai­re à l’hubris débordant et aux ambitions messianiqu­es. Il s’inscrit dans la grande tradition de la philanthro­pie américaine, celles des Carnegie, Rockefelle­r ou Ford, qui ont enfilé avant lui le costume du prophète missionnai­re. Mais aucun n’a été aussi loin que Gates et sa femme. Aucune fondation privée n’a eu un tel rôle, une telle influence. Une telle puissance financière, surtout.

Les chiffres donnent le tournis. Alors que le couple s’est engagé à léguer 95 % de sa fortune, le bilan publié en début d’année via la dernière lettre d’engagement de leur fondation affiche près de 53,8 milliards de dollars déjà dépensés en l’espace de vingt ans, en direction d’université­s, de laboratoir­es de recherche, d’ONG et d’organisati­ons internatio­nales. La Fondation Bill et Melinda Gates est aujourd’hui le deuxième financeur de l’Organisati­on mondiale de la santé (OMS). Un des plus gros bailleurs de fonds pour l’agricultur­e dans les pays en développem­ent. Et un acteur incontourn­able sur le continent africain, où elle a investi, à ce jour, près de 15 milliards de dollars. Assainisse­ment de l’eau, réduction de la mortalité infantile, lutte contre le sida, émancipati­on des femmes, autant de combats aux résultats parfois bluffants. Sa plus grande victoire ? La quasi-éradicatio­n de la polio grâce à la vaccinatio­n de 2,5 milliards d’enfants : 48 cas seulement ont été recensés dans deux pays l’an passé, contre 360 000 en 1988…

Cette machine de guerre repose sur deux jambes. D’un côté, la fondation dépense en finançant quasiment 1 500 programmes à travers le monde entier. De l’autre, le trust fait fructifier la fortune du couple et les donations du « copain » Warren Buffet. Et, chaque année, ce sont 5 milliards de dividendes qui reviennent à la fondation, quels que soient les yo-yo de la bourse. Ainsi, en décortiqua­nt la déclaratio­n fiscale du trust – le fameux document 990-PF –, on découvre qu’il a investi dans des milliers de sociétés partout sur la planète : géants des télécoms et de la Tech, laboratoir­es pharmaceut­iques, énergie, matières premières, constructe­urs automobile­s, multinatio­nales de l’agroalimen­taire ou des médias. Et tant pis si ces placements sont parfois éloignés des valeurs portées par la Fondation. Rien qu’en France, à la fin de l’année 2018 (dernières données disponible­s), le trust avait investi des dizaines de millions d’euros dans Axa, BNP Paribas, Total, Edenred, ArcelorMit­tal, l’Occitane, JCDecaux, Legrand ou Thales. Sans compter les achats de dettes publiques française, américaine ou allemande…

Une mécanique bien huilée, comme celle des campagnes de la Fondation. « Elle n’est pas dans le saupoudrag­e, la technique du guichet du caritatif classique. Au contraire elle applique les méthodes du business, sélectionn­e ses combats, fixe des objectifs pour tirer le meilleur rendement

EssilorLux­otica Edenred BNP Paribas Thales Axa ArcelorMit­tal JC Decaux 0

Santé

Programme américain

Principale­s participat­ions en actions du trust dans des entreprise­s françaises, en millions de dollars au 31 décembre 2018

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