Les secrets de Greta
GRETA THUNBERG. LA VOIX QUI SECOUE LA PLANÈTE PAR MAËLLE BRUN. L’ARCHIPEL, 235 P., 18 €.
Personne au monde ne suscite plus de curiosité que Greta Thunberg. Comment cette adolescente suédoise née en 2003 est-elle devenue, en quelques mois, l’icône mondiale de la lutte contre le réchauffement climatique, un modèle pour des millions de jeunes, écoutée et souvent applaudie par les hommes les plus puissants de la planète ? Ce livre, le premier publié en France sur le sujet, a d’abord le mérite de ne rien cacher de l’enfance difficile de Greta Thunberg.
Maëlle Brun, journaliste rompue à l’exercice des portraits de personnalités (dont celui, remarqué, de Brigitte Macron), nous emmène d’abord à la rencontre des membres de la famille Thunberg. La mère, Malena Ernman, fantasque et populaire chanteuse d’opéra, qui représentera même la Suède à L’Eurovision en 2009. Le père, Svante, comédien, mais qui ne fera pas une carrière à la hauteur de celle de son géniteur. Et puis l’ancêtre, Svante Arrhenius, Prix Nobel de chimie en 1903 pour ses travaux autour des effets du dioxyde de carbone sur le réchauffement climatique, déjà… Enfin la petite soeur, Beata, exact opposé de Greta, aussi sociable et bruyante que son aînée est taciturne et solitaire.
Le mérite de l’enquête de Maëlle Brun est de provoquer chez son lecteur une déception rassurante et réjouissante. Car ceux qui espèrent trouver dans ce livre les preuves que la jeune Greta n’est qu’une marionnette du capitalisme vert, manipulée par des puissances financières occultes ou par des géniteurs militants assoiffés de notoriété et d’argent, en seront pour leurs frais. Greta n’est pas le joujou de ses parents. Au contraire. Impuissants à lutter contre l’autisme Asperger de leur fille, qui ne sera diagnostiqué que tardivement, après une dépression et une anorexie qui la mèneront au bord du gouffre, Malena et Svante épouseront la seule cause qui semble capable de redonner goût à la vie à leur enfant : sauver la planète. Presque une banale histoire de famille…
Manipulée par les ayatollahs verts, Greta ? Certes, l’adolescente a bien été poussée sous les feux de la rampe par un jeune patron de start-up qui a sans doute flairé le filon et lui a ouvert les portes des sommets internationaux. Mais c’est bien elle qui écrit ses discours et peaufine ses arguments. La réalité est finalement beaucoup plus simple et révélatrice des moeurs de notre époque : c’est simplement celle d’une adolescente obstinée et obsessionnelle, qui n’a peur de rien, emploie un langage simple et percutant, érigée en héroïne par les réseaux sociaux pour défendre une cause qui se cherchait une incarnation. Quant à savoir ce qu’il restera de l’effet Greta Thunberg sur notre trajectoire climatique, c’est presque une autre histoire…