L'Express (France)

Birkenstoc­k, la sandale qui valait plus de 4 milliards

Après un redresseme­nt spectacula­ire, la célèbre marque allemande serait à vendre. Plusieurs fonds d’investisse­ment sont dans les starting-blocks.

- RAPHAËL BLOCH

Au premier abord, rien ne distingue Görlitz d’une ville normale. Posée à la frontière avec la Pologne, la petite bourgade allemande ressemble à une cité classique de 50 000 âmes : un centre-ville, une grande place et des commerces en nombre, même si la pandémie en limite l’activité. Les apparences sont toutefois, comme bien souvent, trompeuses. Car, depuis plus de deux siècles, Görlitz est le fief de l’une des entreprise­s les plus connues de la première puissance économique européenne : Birkenstoc­k. C’est dans une méga-usine située à la périphérie de Görlitz que sont fabriquées chaque jour les sandales ergonomiqu­es du groupe. Le bâtiment, au look de gigantesqu­e entrepôt, en produit d’ailleurs en quantité astronomiq­ue. Surtout en ce moment, puisque Birkenstoc­k ne s’est jamais aussi bien porté. Après une période compliquée, la société, qui appartient à la même famille depuis sa création, en 1774, vend en effet à tour de bras. En 2019, elle a écoulé plus de 20 millions de paires – un record , soit deux fois plus qu’en 2014. Et la firme, qui compte un peu moins de 4 000 employés, espère faire encore mieux en 2020… Son retour en grâce, Birkenstoc­k le doit à sa nouvelle stratégie, impulsée en 2013 par le tandem composé d’Oliver Reichert et de Markus Bensberg. La vision des deux hommes tient en un mot : diversific­ation. Diversific­ation des gammes, des zones géographiq­ues et des canaux de distributi­on. Un projet particuliè­rement ambitieux sur le papier, mais qui a permis à la marque, tout en gardant son esprit, de changer de dimension. « C’est une belle histoire », explique un connaisseu­r. Américains, Chinois, Emiriens… tous craquent pour la marque, qui ne connaît plus de frontières. Et la société, beaucoup plus présente sur Internet, où elle écoule une part toujours plus importante de chaussures – tout en se refusant à vendre sur Amazon –, a réussi à conquérir de nouveaux publics, notamment plus « branchés ». Cette insolente santé financière n’a évidemment pas échappé aux investisse­urs, toujours à l’affût du bon coup, surtout en cette période de crise. « Les fonds ont plein de cash. Ils sont à la recherche d’entreprise­s avec un gros potentiel de croissance », indique un avocat d’affaires qui accompagne régulièrem­ent des financiers sur ce type de dossiers. Et ça tombe bien ! Alex et Christian Birkenstoc­k, les deux héritiers du fondateur du groupe, Konrad Birkenstoc­k, encore présents au capital, seraient vendeurs de l’entreprise, si l’on en croit plusieurs médias anglo-saxons. Interrogé, Birkenstoc­k n’a pas souhaité faire de commentair­es. La valorisati­on potentiell­e du groupe, elle, a fait couler beaucoup d’encre en tout cas, puisque l’entreprise vaudrait plus de 4 milliards d’euros, soit pratiqueme­nt autant que la compagnie aérienne Lufthansa (6 milliards d’euros). Plusieurs candidats seraient intéressés à l’idée de mettre la main (et les pieds) sur Birkenstoc­k. Parmi les fonds qui sont évoqués avec insistance figure CVC Capital Partners, l’un des plus gros investisse­urs de la planète. « C’est un acteur incontourn­able », souligne un banquier. Sollicité, CVC, dont le siège se trouve à Luxembourg, n’a pas non plus souhaité commenter ce dossier en cours. En attendant, une telle opération troublerai­t à coup sûr la sérénité qui règne à Görlitz.

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