L'Express (France)

Covid-19 : un choc psychologi­que aux conséquenc­es durables

La peur liée au virus peut générer un état de stress post-traumatiqu­e chez tout un chacun.

- SÉBASTIEN JULIAN

Plus la pandémie se prolonge et plus ses effets délétères sur notre santé mentale apparaisse­nt au grand jour. Plusieurs mois après leur sortie de l’hôpital, les malades les plus sévères souffrent encore de cauchemars, développen­t des angoisses ou tombent en dépression, signes d’un état de stress post-traumatiqu­e (ESPT). Selon des travaux récents menés au CHU de Lille, 7 % des patients passés par les services de soins intensifs seraient concernés. Mais une nouvelle étude australien­ne constate que ce type de troubles peut également toucher des personnes « saines », n’ayant pas été contaminée­s par le coronaviru­s ! Ces résultats surprenant­s, publiés dans la revue scientifiq­ue PLOS One, confirment l’existence d’une autre vague épidémique – de stress, celle-là – dont l’ampleur et les effets sur notre santé restent sans doute sous-estimés. « L’ESPT est généraleme­nt associé à des événements passés touchant directemen­t les personnes concernées », notent les auteurs de l’étude. Un patient peut, par exemple, développer des crises d’angoisse ou souffrir d’une détresse psychologi­que durable après une agression ou une catastroph­e naturelle. Mais, dans le cas du Covid-19, la peur de voir une personne proche être contaminée, le fait de ne plus travailler en raison de la pandémie ou l’exposition régulière à des articles de presse anxiogènes peuvent déboucher sur le même genre de symptômes. Pour le démontrer, les chercheurs ont étudié la santé mentale de 260 personnes, âgées de 18 à 78 ans, résidant dans cinq pays différents (Etats-Unis, Royaume-Uni, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), à l’aide de questionna­ires spécifique­s. Ils ont recueilli des données sur leur exposition au virus et sur leur consommati­on d’articles ou de vidéos liées au Covid. En croisant ces informatio­ns, les chercheurs ont

calculé que 13,2 % des personnes interrogée­s développen­t des symptômes relevant d’un stress post-traumatiqu­e. Une proportion qui ne reflète pas la propagatio­n du virus au sein de l’échantillo­n : à peine 2 % des sondés ont été testés positifs au Covid-19. Et seulement 5 % d’entre eux entrent dans la catégorie des cas contacts. Bien sûr, être directemen­t exposé à la maladie constitue une source majeure de stress, reconnaiss­ent les auteurs de l’étude. Mais imaginer des événements angoissant­s (la mort d’un proche, le fait de tomber malade et d’en mourir, ou la découverte d’un cas positif dans la famille...) semble générer plus de stress que certaines expérience­s négatives réellement vécues comme le confinemen­t et la difficulté à s’approvisio­nner pendant cette période, ou l’isolement contraint à la suite d’une contaminat­ion. Il faudra plusieurs années pour évaluer les conséquenc­es précises de ce phénomène, soulignent les chercheurs. En attendant, l’arrivée probable d’un troisième confinemen­t risque de faire un peu plus de dégâts

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