PAR SÉBASTIEN LAPAQUE. ACTES SUD, 336 P., 21,80 €.
Il y a trois ans, dans Comment notre monde a cessé d’être chrétien, l’historien Guillaume Cuchet décortiquait brillamment l’effondrement de la pratique religieuse en France. Si le christianisme déserte la société, il inspire les écrivains. On se souvient de la fin mystique dans Sérotonine de Houellebecq. A la dernière rentrée littéraire, La Grâce de Thibault de Montaigu est devenu un succès de librairie. C’est au tour de Sébastien Lapaque de parler de conversion avec ce roman bernanosien qui met en scène un quadragénaire chamboulé par la foi. Le héros du livre, le bien nommé Lazare, est un prof d’histoire-géographie dépité par notre temps, son scientisme et son cynisme, tout ce qu’il nomme « l’Immonde ». Un jour, sa compagne le quitte. Oublier le régime strict qu’elle lui imposait, pour se remettre aux omelettes de douze oeufs, ne suffit pas à le consoler. C’est lors d’une visite à son père que Dieu lui est révélé, dans la cathédrale de Chartres. Suite à ce retour en grâce, il cherche la voie auprès de ses amis (dont l’excellent Walter) et d’une mystérieuse femme, Lucie, qui étudie la disparition des moineaux et achève de lui faire voir la vie autrement. Lazare est trop âgé pour qu’on parle à son sujet d’un roman de formation. De quoi s’agit-il alors ? D’un roman de réforme ? De contre-réforme ? Ceux qui se font de Sébastien Lapaque l’image d’un antimoderne atrabilaire seront surpris par ce livre qui tend plus vers la poésie d’Apollinaire que vers les diatribes de Léon Bloy. Souhaitons à l’auteur que son texte circule, que se répande la bonne parole et qu’il convertisse à son tour d’autres agnostiques : ce serait, en un sens, la Pentecôte de Lapaque.