« Covid long » : une prise en charge un peu mieux définie
La persistance de symptômes plusieurs mois après la maladie reste un phénomène mal compris par les chercheurs et les médecins. Mais des solutions se dessinent.
Fatigue, difficultés à respirer, crises d’angoisse, troubles de l’attention ou de la mémoire… Infectés par le Covid-19 il y a des mois, certains patients souffrent encore de symptômes persistants. Le phénomène, baptisé « Covid long », a été identifié dès mai 2020, mais les mécanismes à l’origine de cet état restent mal compris, et la prise en charge peu adaptée. Le 12 février, la Haute Autorité de santé (HAS) a publié un rapport dans lequel elle analyse l’ensemble des connaissances scientifiques et insiste sur les modalités de suivi des patients Covid long. « Notre but est de proposer aux médecins de ville une mise à jour des connaissances et de leur fournir une feuille de route la plus précise possible, afin que la prise en charge soit effectuée au plus tôt, car il est probable que, dans ce cas, les symptômes persistent moins longtemps », résume Olivier Robineau, spécialiste des maladies infectieuses au centre hospitalier de Tourcoing et corédacteur du rapport de la HAS. Le médecin tourquennois insiste notamment sur l’importance du soutien psychologique. « Les thérapies comportementales et cognitives aident à la disparition des symptômes sans lésion d’organe. Les patients peuvent être déçus si on ne leur propose pas de médicaments, mais, quand une bactérie ou un virus n’est plus présent dans l’organisme, il faut envisager d’autres pistes. » Ainsi, le plan de soins de la HAS intègre médecins généralistes, kinésithérapeutes, rééducateurs ou encore psychologues. « Des malades présentent un scanner des poumons et des échanges gazeux normaux, mais ont du mal à respirer correctement, avec un syndrome d’hyperventilation, détaille Olivier Robineau. Après la maladie, certains ont désappris à respirer, or la mécanique respiratoire régule une grande partie du corps, la tension, etc. Nous conseillons alors des rééducations. » Chez les cas où les symptômes sont atypiques, Olivier Robineau suggère de pratiquer des contrôles plus poussés, à condition de déterminer si d’autres causes que le Covid long les expliquent. « Il faut éviter de prescrire trop d’examens complémentaires qui peuvent être anxiogènes, insiste-t-il. Et il ne faut pas hésiter à réévaluer l’état des patients quitte à abandonner les traitements qui n’apportent pas d’amélioration, afin d’éviter les logiques d’échec. » Si la feuille de route est détaillée, la littérature scientifique sur le Covid long est moins précise. Les études menées sur la persistance des symptômes après une première infection sont très variables et indiquent que de 10 % à 76 % des patients infectés en souffrent après six mois. Un écart-type très large qui peut s’expliquer par le fait que de nombreux travaux se cantonnent à des patients hospitalisés – donc présentant les formes les plus graves –, laissant de côté ceux atteints par des formes plus légères. « Nous n’avons pas un bilan exhaustif au niveau de la population générale », reconnaît Olivier Robineau. Pour cela, il faudra attendre les études – longues et coûteuses – menées sur des milliers de personnes pendant des années. Les quatre symptômes les plus courants sont la fatigue, l’essoufflement, les douleurs diffuses et thoraciques, la perte du goût et de l’odorat. Viennent ensuite les troubles des fonctions supérieures : la difficulté à se concentrer, la perte de mémoire, etc. Mais ces symptômes sont-ils uniquement liés à l’infection du virus ? « Le débat est loin d’être tranché, affirme le spécialiste. Certains patients sont choqués par la maladie ou par le confinement, ce qui provoque une somatisation des symptômes. Et si ces derniers sont effectivement provoqués par le Covid, est-ce directement lié au virus, à la réaction du système immunitaire, à la période de récupération ou au contexte épidémique ? » Les troubles neurologiques sont particulièrement difficiles à analyser. « Les patients qui se plaignent uniquement de troubles de la concentration sont envoyés en consultation neurologique. Mais comment procéder pour les autres ? Fatigue, anxiété, dépression réactionnelle, il n’est pas évident de faire la part des choses », souligne le spécialiste. Il existe également des symptômes qui n’ont rien à voir avec le virus, parce qu’un tel événement passé peut peser durablement. « Des patients ont, par exemple, souffert de diarrhées lors de l’infection et, si elles se reproduisent, ils peuvent penser à tort qu’elles sont liées au Covid-19 », relève le Dr Robineau. Ces phénomènes post-traumatiques sont courants. Seul un temps très long pourra les atténuer ou les faire disparaître.
Les troubles neurologiques sont particulièrement difficiles à analyser