L’autre facette des business schools à la française
ENTREZ RÊVEURS, SORTEZ MANAGEURS. FORMATION ET FORMATAGE EN ÉCOLE DE COMMERCE
PAR MAURICE MIDENA. LA DÉCOUVERTE, 312 P., 20 €. ✷✷✷✷✷
Entrez rêveurs, sortez manageurs : c’est le titre que le journaliste Maurice Midena a donné au livre qu’il consacre aux business schools françaises, détournant au passage le slogan publicitaire de l’un de ces établissements. Un détournement qui signale d’emblée au lecteur que le ton sera critique, pour ne pas dire acerbe. Sa démarche est de fait celle de quelqu’un qui ne cache pas son militantisme de gauche, mais aussi celle, plutôt bien renseignée, d’un ancien élève. Pour l’auteur du présent article, qui a été professeur dans une école de commerce pendant vingt ans, l’ouvrage met souvent en évidence des travers incontestables et des limites très réelles de ces institutions. Il frappe juste quand il rappelle la déception des étudiants face à certains cours qu’ils jugent « pipeau » ou à des enseignements délivrés dans un anglais approximatif. De même, il dénonce le recul du niveau des études dû notamment à une évolution des critères d’admission, de moins en moins stricts. Ce recul tend à faire naître chez les recruteurs potentiels une forme de doute sur les compétences des diplômés. Ces critiques portent d’autant plus que, les frais de scolarité ne cessant d’augmenter, les élèves et leurs familles manifestent de plus en plus de mécontentement. Mais on est moins convaincu quand Maurice Midena fustige parmi les étudiants un entre-soi savamment recherché entretenant chez eux arrogance et sentiment de supériorité. Cet entre-soi ne serait pas sans conséquences sur leur comportement professionnel après leur sortie d’école. Les fêtes organisées certains soirs après les cours en sont présentées par l’auteur comme un symbole frappant. Or ces fêtes, dont il souligne une alcoolisation préoccupante, restent anecdotiques. En réalité, la formation en école de commerce est caractérisée par une incroyable diversité des parcours offerts, reposant sur de nombreux stages et sur une multitude d’échanges avec des institutions universitaires réparties sur l’ensemble de la planète. D’ailleurs, ce qui frappe à la lecture d’Entrez rêveurs…, c’est que l’auteur fait mine d’ignorer – ou de négliger – l’ouverture internationale de ces écoles. Un des résultats de cette ouverture est la reconnaissance dont elles bénéficient au niveau mondial. C’est ainsi que les plus prestigieuses d’entre elles occupent les premières places dans les classements internationaux de business schools. Si ce livre nous en apprend beaucoup, et si ceux qui ne sont pas familiers de ce type d’établissements feront probablement des découvertes sur les problèmes que pose la formation de nos futures élites économiques, on aurait aimé une approche plus fouillée, moins tendancieuse et évitant une certaine complaisance.