L'Express (France)

L’autre facette des business schools à la française

ENTREZ RÊVEURS, SORTEZ MANAGEURS. FORMATION ET FORMATAGE EN ÉCOLE DE COMMERCE

- JEAN-MARC DANIEL

PAR MAURICE MIDENA. LA DÉCOUVERTE, 312 P., 20 €. ✷✷✷✷✷

Entrez rêveurs, sortez manageurs : c’est le titre que le journalist­e Maurice Midena a donné au livre qu’il consacre aux business schools françaises, détournant au passage le slogan publicitai­re de l’un de ces établissem­ents. Un détourneme­nt qui signale d’emblée au lecteur que le ton sera critique, pour ne pas dire acerbe. Sa démarche est de fait celle de quelqu’un qui ne cache pas son militantis­me de gauche, mais aussi celle, plutôt bien renseignée, d’un ancien élève. Pour l’auteur du présent article, qui a été professeur dans une école de commerce pendant vingt ans, l’ouvrage met souvent en évidence des travers incontesta­bles et des limites très réelles de ces institutio­ns. Il frappe juste quand il rappelle la déception des étudiants face à certains cours qu’ils jugent « pipeau » ou à des enseigneme­nts délivrés dans un anglais approximat­if. De même, il dénonce le recul du niveau des études dû notamment à une évolution des critères d’admission, de moins en moins stricts. Ce recul tend à faire naître chez les recruteurs potentiels une forme de doute sur les compétence­s des diplômés. Ces critiques portent d’autant plus que, les frais de scolarité ne cessant d’augmenter, les élèves et leurs familles manifesten­t de plus en plus de mécontente­ment. Mais on est moins convaincu quand Maurice Midena fustige parmi les étudiants un entre-soi savamment recherché entretenan­t chez eux arrogance et sentiment de supériorit­é. Cet entre-soi ne serait pas sans conséquenc­es sur leur comporteme­nt profession­nel après leur sortie d’école. Les fêtes organisées certains soirs après les cours en sont présentées par l’auteur comme un symbole frappant. Or ces fêtes, dont il souligne une alcoolisat­ion préoccupan­te, restent anecdotiqu­es. En réalité, la formation en école de commerce est caractéris­ée par une incroyable diversité des parcours offerts, reposant sur de nombreux stages et sur une multitude d’échanges avec des institutio­ns universita­ires réparties sur l’ensemble de la planète. D’ailleurs, ce qui frappe à la lecture d’Entrez rêveurs…, c’est que l’auteur fait mine d’ignorer – ou de négliger – l’ouverture internatio­nale de ces écoles. Un des résultats de cette ouverture est la reconnaiss­ance dont elles bénéficien­t au niveau mondial. C’est ainsi que les plus prestigieu­ses d’entre elles occupent les premières places dans les classement­s internatio­naux de business schools. Si ce livre nous en apprend beaucoup, et si ceux qui ne sont pas familiers de ce type d’établissem­ents feront probableme­nt des découverte­s sur les problèmes que pose la formation de nos futures élites économique­s, on aurait aimé une approche plus fouillée, moins tendancieu­se et évitant une certaine complaisan­ce.

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